Les tilleuls de la place de la mairie de Lèves ont donc été coupés. Ils étaient en bon état sanitaire. Le seul qui a été épargné, dans l’angle, le long des murs, développe, quant à lui, de beaux champignons. Le tronc sectionné n’a pas permis de voir, si doute il pouvait encore y avoir, les éventuelles traces de blessures ou d’attaques d’insectes.
Ce sont donc dix-huit arbres sains qui sont passés par pertes et profits.
Certains d’entre eux avaient encore le pied en terrain perméable. D’autres, moins chanceux, avaient connu l’enrobé trop généreusement étalé. Hérités d’un passé plus doux avec les plantes, arbres symboles de l’espace public, ils avaient poussé tranquillement. Ils avaient été taillés au long de leur vie en tête de chat, mais cela n’affecte pas leur longévité, même si le traitement paraît drastique a priori. Une taille simple, très commune, héritière des têtards paysans, très proche d’un passé rural. Pour une fois, celui-ci avait été suivi dans le temps ; pas de grosses branches fragilisées à la base, posées en équilibre sur des tissus morts. À condition de poursuivre cet entretien, ils pouvaient encore continuer leur bonhomme de vie.
C’est bien la suppression d’une vie ordinaire et tranquille et d’équilibres sensibles qui est signifiée par ce geste brutal.
Parce qu’enfin, la mairie n’est pas un bâtiment altier et cet accompagnement végétal, par sa hauteur, le choix de l’espèce et son traitement allaient de pair dans la relation de proximité d’un équipement, de la place et d’une population. Finalement un peu comme dans beaucoup de communes du département, comme à Luisant, à l’angle de l'avenue de la République et de la rue Lépine, précisément à côté de la mairie. Il devait bien y avoir moyen de faire avec, utiliser ces « habitants » de l’espace public pour proposer un projet si la volonté était de revoir le fonctionnement de cet espace extérieur.
Mais non, ce n’est donc pas si évident de composer, il vaut mieux tout raser, solution empressée pour bureau d’études en limite de compétence et/ou pour décideur en recherche de pignon sur rue. La recherche d’image n’est pas vraiment compatible avec le ménagement des lieux.
François Roumet