Dès le lendemain de l’élection municipale du 15 mars 2020, le Premier ministre annonçait le report sine die du second tour pour 5 000 communes tout en proposant de « sanctuariser » les résultats dans les 30 000 communes où le scrutin avait été conclusif.
Proposition retranscrite dans une loi d’urgence déposée par le gouvernement 48 heures plus tard au Sénat. Ce projet de loi a ensuite réussi l’exploit d’être examiné par une poignée de parlementaires des deux assemblées en 48 heures pour une adoption en commission mixte paritaire réunie le dimanche et une promulgation dès le lundi matin !
Bien sûr, vu la cavalcade effrénée pour adopter cette loi – 5 jours seulement entre son dépôt et sa promulgation – personne n’a souhaité ni osé saisir le Conseil constitutionnel afin de s’assurer que ses dispositions ne heurtaient pas nos libertés fondamentales.
Cette « sanctuarisation » des résultats des premiers tours conclusifs est inscrite dans la loi par cette simple phrase : « Dans tous les cas, l’élection régulière des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers d’arrondissement, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains de Lyon élus dès le premier tour organisé le 15 mars 2020 reste acquise, conformément à l’article 3 de la constitution ».
Mais que dit l’article 3 de la constitution ? « Le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par la constitution. Il est toujours universel, égal et secret. » Nous soutenons – et des milliers de maires et candidats avec nous – que ce scrutin n’a été ni régulier, ni libre, ni universel, ni égal, ni même secret !
Alors… 30 000 communes sur 35 000 ont élu leur conseil municipal au premier tour ? Regardons les chiffres d’un peu plus près : ils cachent une réalité bien différente !
Pour 34 922 communes, différentes « catégories » d’élections municipales !
Les élections « sans compétition »
Parmi les 30 094 conseils municipaux élus dès le premier tour, 2/3 d’entre eux n’ont donné lieu à aucune compétition, soit 18 980 communes sans compétition :
– 3 812 communes de plus de 1000 habitants où une seule liste se présentait : les conseils municipaux ont donc été élus avec 100% des suffrages exprimés ;
– 15 168 communes de moins de 1000 habitants, où tous les candidats ont été élus avec le vote de plus de 25% des inscrits comme le prévoit la loi pour les communes de cette strate.
Pour l’ensemble de ces communes, la légitimité des élus est donc peu contestable même si certains auraient préféré l’asseoir sur une participation plus importante : crise sanitaire ou pas, ils auraient été élus de la même façon.
Dans ces 18 980 communes, la baisse de la participation n’a donc pas eu d’impact réel sur le résultat.
Les élections « avec compétition »
– 15 942 communes avec compétition : 4 828 communes nécessitent un second tour (3 399 communes de moins de 1 000 habitants et 1 429 communes de plus de 1 000 habitants). Pour celles-ci, si le second tour ne peut avoir lieu en juin, la loi du 23 mars prévoit que l’ensemble de l’élection, premier et second tours, soit rejouée après l’été. Il n’y a donc pas vraiment lieu de contester non plus cette élection puisqu’elle sera automatiquement annulée. Il reste donc 11 114 communes pour lesquelles la loi du 23 mars, adoptée dans l’urgence sans presque aucun débat, sans vérification de sa constitutionnalité, voudrait « sanctuariser » les résultats.
Or plus de 2 700 recours ont déjà été déposés au 5 avril. C’est le quart du nombre d’élections contestables ! C’est plus de 6 fois le nombre de recours enregistrés pour l’élection municipale de 2014. Et des dizaines de nouveaux recours sont encore déposés chaque jour puisque le délai de recours a été prorogé jusqu’à 5 jours après l’installation des nouveaux conseils municipaux. Combien faudra-t-il encore de recours pour dire que ce qui s’est passé n’est pas normal ?
9 millions d’électeurs fidèles au scrutin municipal manquaient à l’appel, soit… 30% de participation en moins !
On lit ici ou là que la participation a baissé en France de 18%. C’est faux ! En réalité, la participation est passée de 60% en 2014 à 42% en 2020. C’est une baisse de 18 points et non pas de 18%. Cela représente en 2020 30% d’électeurs en moins par rapport à 2014 (soit 18/60) : Soit environ 9 millions d’électeurs qui s’étaient déplacés en 2014 et ont préféré se confiner en 2020 (et on peut les comprendre) !
Des listes élues avec les voix de moins de 15% des inscrits, soit 85% des électeurs n’ont pas voté pour le maire élu.
Comment un maire élu le 15 mars pourrait-il asseoir sa légitimité pendant six ans alors que 85% de ses administrés n’ont pas voté pour lui ?
Sur les 8 742 communes de plus de 1 000 habitants où le premier tour a été conclusif, 11 listes ont été élues avec moins de 15% des inscrits, 211 entre 15 et 20% et 1 028 entre 20 et 25%. Si la règle qui s’applique à toutes les communes de moins de 1 000 habitants s’appliquait également aux communes des strates supérieures, un second tour aurait été nécessaire dans toutes ces communes ! Rappel : dans les communes de – de 1 000 habitants, personne ne peut être élu s’il ne réunit pas au minimum les suffrages de 25 % des inscrits.
Y aurait-il un « accord » politique pour le maintien des résultats du scrutin du 15 mars 2020 ? Les ténors de tous les grands partis se taisent sur la réalité de cette élection, sur les pressions évidentes qu’ont subies certaines catégories d’électeurs pour ne pas se rendre au scrutin, sur les conditions dans lesquelles celui-ci a eu lieu. Les résultats les satisfont-ils ? Ou peut-être craignent-ils simplement qu’une élection dans des conditions redevenues normales ne donne des résultats bien différents, notamment pour les « plus mal élus » d’entre eux ?
– Gérald Darmanin, LREM (ex-LR), ministre de l’Action et des Comptes publics, élu au premier tour à Tourcoing avec les voix de 15,05% des inscrits.
– Jean Leonetti, ex-président et vice-président des Républicains, ancien ministre, élu au premier tour à Antibes avec les voix de 15,60% des inscrits.
– Franck Riester, président d’Agir, ministre de la Culture, ex-député, élu au premier tour à Coulommiers avec les voix de 17,03% des inscrits.
– Natacha Bouchart, LR, ex-sénatrice, vice-présidente de la région Hauts-de-France, élue au premier tour à Calais avec les voix de 18,29% des inscrits.
– Michèle Tabarot, députée LR, ex-secrétaire générale de l’UMP, élue au premier tour au Cannet avec les voix de 18,38% des inscrits.
– Hubert Falco, LR, ex-sénateur, ex-ministre, ex député, élu au premier tour à Toulon avec les voix de 18,52% des inscrits.
– David Rachline, RN, ex-sénateur, élu au premier tour à Fréjus avec les voix de 18,74% des inscrits.
– Xavier Lemoine, vice-président du Parti Chrétien Démocrate élu au premier tour à Montfermeil avec les voix de 19,68% des inscrits.
– Arnaud Robinet, LR, ex-député, ex-secrétaire national de l’UMP élu au premier tour à Reims avec les voix de 19.93% des inscrits.
– François Baroin, ex-ministre, ex-député, ex-sénateur, Président de l’Association des Maires de France (AMF), élu au premier tour à Troyes avec les voix de 20.01% des inscrits.
– Jean-Christophe Fromantin, ex-UDI, ex-député, élu au premier tour à Neuilly avec les voix de 21.38% des inscrits.
– André Santini, LR, vice-président de la métropole du Grand Paris, ex-député, ex-ministre, élu au premier tour à Issy-les-Moulineaux avec les voix de 22,86% des inscrits.
L’association « 50 millions d’électeurs ! », présidée par Renaud George, maire de Saint-Germain-au-Mont-d’Or, demande l’annulation de l’élection municipale du 15 mars 2020, l’organisation d’un nouveau scrutin dans des conditions redevenues normales pour que les élus municipaux soient le reflet réel du corps électoral.
Qui sommes-nous ? Déjà + de 200 maires et candidats, déjà + de 2 000 adhérents, tous mobilisés pour obtenir l’annulation du premier tour des élections municipales du 15 mars 2020 ils ont créé une association – « 50 millions d’électeurs ! » – pour défendre le suffrage universel et le droit de chaque citoyen à être justement représenté dans l’expression de son vote. Avec 2 700 recours au tribunal administratif (chiffres officiels au 5 avril 2020), une pétition en ligne qui rassemble près de 13 500 personnes à ce jour, des premiers sondages qui interrogent la représentativité du 1er tour des élections municipales, c’est un véritable mouvement de fond qui est lancé !
Mail : 50millions@electeurs.fr
Facebook : @50millionsdelecteurs
Web : www.electeurs.fr