Voilà un excellent livre pour les vacances de février. Le dernier roman de Philippe Djian, Les inéquitables, contient tous les ingrédients du bon roman que l’on attend, là où la brume se lève derrière ses lumières, là où les villes côtières se réveillent. Et c’est justement près de l’océan que se situe l’action des Inéquitables. Une sorte de huis clos resserré sur quelques personnes. Un huis clos pesant, où la tension est palpable dans chaque ligne. C’est l’univers de Philippe Djian qui a maintenant l’habitude de nous présenter le côté obscur de ses personnages.

Il n’y a rien de solaire. Les héros de Djian se promènent dans la vie avec leurs fragilités et leurs cicatrices au sens propre comme au sens figuré. La violence se dissimule dans la nuit. Diana a perdu son mari tragiquement et se remet tant bien que mal du départ prématuré de Patrick, dont le frère Marc veille désormais sur elle. Plus ou moins mêlés à des affaires louches, les deux frangins ne sont pas tout blancs ni tout noirs. Un troisième larron, Joël, le frère de Diana, complète le tableau de ces gens troubleux qui entourent Diana, sage dentiste. Et puis il y a Serge, le fils du maire, pas très clair non plus. Cet homme de la nuit fréquente des gens peu recommandables au regard de la loi. On se demande même si Serge ne serait pas un petit peu policier. Tout ce petit monde se cherche et se trouve parfois pour de bonnes ou de très mauvaises raisons.

Avec habileté, Philippe Djian nous parle de la complexité des relations humaines. Ce qui peut paraître clair devient soudain ambigu. Mais l’amour est bien présent sous toutes ses formes. De l’amour perdu à l’amour passionnel allant jusqu’à la mort en passant par l’amour physique sans enjeu sentimental et le viol. Avec une écriture toujours soutenu, implacable, Philippe Djian avance masqué laissant à peine quelques pistes pour entrevoir l’issue de cette histoire que l’on sent morbide vu l’ampleur des emmerdes qui s’entassent au fil du temps pour Diana, Marc ou Joël. Avec Philippe Djian, dès que le jour se lève sur la mer et que la nuit a repris tous nos rêves, il ne faut pas demander à ses personnages d’être sages puisqu’ils n’ont peur de rien.

Pascal Hébert

Les inéquitables, de Philippe Djian aux éditions Gallimard, 166 pages, 17 euros.