Avec un roman ayant comme toile de fond et en guest star la montagne, Jean-Christophe Rufin s’est lancé un véritable défi. Contrairement au cinéma et à la télévision, la littérature n’est pas franchement inondée par des livres où la montagne est un véritable personnage. Même constat avec la mer d’ailleurs.

Avec Les flammes de pierre, Jean-Christophe Rufin comble cette lacune en se lançant dans le vide. Mais en excellent montagnard qu’il est, il a bien vérifié son matériel avant d’escalader la roche littéraire pour avancer sur la paroi d’une belle histoire d’amour. Une histoire d’amour qui aurait pu tourner à l’eau de rose voire à un classique du genre, si la montagne n’était pas devenue un personnage aussi important que Rémy et Laure. Rémy est un guide chevronné du côté de Chamonix et Laure, une Parisienne issue du milieu de la finance. Rémy, c’est plutôt le play boy qui joue les gigolos avec les femmes qu’ils guident dans la montagne. De son côté, Laure est sans doute moins affirmée dans son rôle social où tout est basé sur l’argent. Alors qu’elle est avec des amis à Chamonix, elle fait la rencontre de Rémy. Une véritable idylle naîtra entre eux. Tout en respectant leur choix de vie, Laure et Rémy s’accordent des rencontres à la montagne jusqu’au jour où le montagnard aura envie de tout quitter pour vivre avec sa belle, quitte à embrasser une autre vie citadine cette fois-ci.

Finalement, la greffe ne prend pas entre un homme aimanté par les mystères de la montagne et la ville qui efface doucement mais sûrement les rêves. La rupture devient inéluctable. Rémy retrouvera sa montagne pour recoller son cœur en pièces et oublier Laure. Mais l’amour n’oublie jamais de réunir ceux qui s’aiment. Victime d’un accident de voiture, Laure atterrira dans un centre de rééducation fonctionnelle près de Chamonix. Une relation commune jouera l’intermédiaire pour que ces deux là se retrouvent. Il faudra que Laure décide de changer de voie et de vie pour qu’enfin cLaure et Rémy se retrouvent après une tragédie en montagne.

Ceux qui prennent la montagne et la mer le savent. Ils vont bien souvent à la rencontre d’eux-mêmes, de leur limite et de leur mental. Mais l’aventure peut s’avérer dangereuse car la montagne, tout comme la mer, ne pardonne pas la moindre faute et la moindre faiblesse. C’est aussi le prix à payer pour trouver la liberté et la réalité de notre condition d’homme. Ce que Jean-Christophe Rufin résume parfaitement avec Laure : « Elle se dit que la montagne lui apportait exactement tout ce dont la société avait prétendu la délivrer. Elle avait vécu dans un monde qui ne veut plus voir la mort, qui a la douleur en horreur, qui veut réduire l’effort à son maximum, un monde de confort et de protection qui fait des êtres qui le peuplent des victimes plutôt que des créateurs, des esclaves plutôt que des souverains ». A méditer…

Pascal Hébert

Les flammes de pierre, de Jean-Christophe Rufin, éditions Gallimard, 346 pages, 21 €.