Mercredi 8 mars, à la librairie l'Esperluète, une soirée-lecture en arpentage était proposée par la Commission Écoféminisme de Génération Écologie.

L'arpentage est une méthode de lecture collective issue de l'éducation populaire. L'objectif est qu'à la fin d'une séance, chaque participant.e.s ait une expérience intime de lecture d'une partie de l'ouvrage, une idée globale des thèses défendues par l'autrice ou l’auteur et de sa pensée, avec la possibilité de partager ses impressions et réflexions et de les mettre en débat avec les autres.

Nous étions donc une dizaine d’inscrit.e.s pour arpenter le livre de Françoise d’Eaubonne Écologie et féminisme : Révolution ou mutation ? publié en 1978, réédité tout récemment chez Le Passager Clandestin, Libre et Solidaire.

Françoise d’Eaubonne (1920-2005), autrice prolifique et militante féministe française, pionnière de l’écoféminisme, invente le terme en 1974 (l’année où René Dumont, premier candidat écologiste, se présente à la présidentielle) dans son livre Le Féminisme ou la mort, fruit d’une réflexion élaborée au sein du groupe « Écologie et féminisme », une section du Mouvement de libération des femmes (MLF).

Nous nous sommes donc lancé.e.s dans une lecture en arpentage, (première expérience pour tout le monde) : nous avions 45 minutes pour lire seul.e notre partie d’une trentaine de pages pour ensuite en faire une synthèse au groupe.  Pas si simple d’entrer dans l’ouvrage de cette façon et d’arriver à synthétiser les idées… Nous avons néanmoins réussi à faire ressortir les idées phares. L’exploitation de la nature et l’oppression des femmes ont un dénominateur commun : le patriarcat. L’expansion du capitalisme à l’échelle mondiale multiplie les effets de l’appropriation par les hommes, au cours des siècles, de la fertilité des femmes et de la terre ; c’est la vie même qui est menacée.

Face à l’incapacité des hommes au pouvoir à gérer la crise écologique et économique, il revient aux femmes de reconquérir leur fécondité et d’œuvrer à la mutation vers une société écologique, égalitaire et autogestionnaire. Selon Françoise d’Eaubonne, seule une mue écoféministe de l’humanité nous permettra de préserver ce qu’il reste de l’environnement. Ce texte est visionnaire…

Après plus de deux heures entre Chartrain.e.s, nous avons pu échanger en visioconférence avec d’autres lectrices et lecteurs de toutes la France pour présenter nos différents ouvrages avec la présence éclairée de Vincent d’Eaubonne, fils de l’autrice.

Françoise d’Eaubonne, en faisant converger deux luttes, le féminisme et l'écologie,  propose des pistes pour bâtir un écoféminisme résolument radical et intersectionnel. Le problème n'est pas les hommes en tant que tels, mais la façon dont les rapports hommes/femmes se structurent dans une société patriarcale. Les injonctions sociales sont nombreuses et faciles à intérioriser, mais il n'est pas trop tard pour déconstruire tout cela ! Vandana Shiva, figure internationale de l'écoféminisme a d'ailleurs reçu le prix Nobel alternatif en 1993... Le défi, selon elle, consiste à libérer les femmes, en même temps que la nature, de l'emprise socio-économique et technologique des hommes. Nous avons besoin d'un soulèvement de masse et d'une réappropriation du débat politique !

Il faut lire absolument Françoise d’Eaubonne, seul.e ou bien en arpentage, méthode à diffuser pour lire ensemble et débattre ensuite.