Amanda Sthers, romancière et cinéaste, a mis de côté son imaginaire pour s’arrêter un instant sur les villes qu’elle a découvertes au fil de ses voyages. Âme sensible, Amanda sait écouter les battements du cœur de ces métropoles qu’elle nous fait visiter à travers son regard, ses émotions dans un magnifique ouvrage.
Le bruit des villes est le départ d’un véritable tour du monde pour voyageurs immobiles. Les villes ont inspiré de nombreux poètes, chanteurs et écrivains comme Yves Simon J’ai rêvé New York, Paris 75, Claude Nougaro et son hymne Ô Toulouse ou encore Dick Annegarn avec la merveilleuse Bruxelles. Bien évidemment, chaque ville laisse une trace dans la mémoire de chacun, comme une histoire d’amour, une angoisse, un cri, une espérance, une odeur, une joie ou l’impression d’arriver chez soi. Amanda, avec pudeur, ouvre en parallèle son livre intime pour parler de ce qu’elle voit, ressent et entend. D’ailleurs, rarement la romancière ne s’est confiée sur sa jeunesse comme on le découvre avec Brest et son adolescence avec New York.
Amanda nous présente ses villes comme des images épinglées sur les murs de sa chambre secrète. Elle a laissé sa plume vagabonder au gré de ses souvenirs pour nous faire partager les bruits qui résonnent dans chacune de ces grandes métropoles. Nos vies sont des cartes postales semble dire Amanda, dont les silences étoilés forment un langage qui répond bien aux mots d’Yves Simon : « Si un jour il n'y avait plus de mots construits, que toutes les langues d'hommes pourrissent au fond des bouches, derrière des baillons d'oppression, il faudrait bien réinventer des langages de peau et des messages codés du regard. »
Le bruit des villes est réalisé avec la complicité de Pauline Lévêque. Cette artiste apporte la légèreté de son trait pour illustrer chaque ville décrite par Amanda. De bonnes fées se sont penchées sur le berceau de Pauline Lévêque puisque son père n’est autre qu’Yves Lévêque, peintre reconnu. Pauline est également la filleule de l’écrivain Michel Tournier. Le Prix Goncourt 1970 a eu l’occasion de se rendre dans la classe du collège de Pauline à Dreux pour y rencontrer les élèves et partager son amour des mots. Michel Tournier, avec élégance et passion, avait expliqué aux jeunes collégiens de la cité durocase qu’il fallait admirer un écrivain, un peintre, un poète avant de le copier pour trouver enfin sa voie et sa propre langue.
Pascal Hébert
Le bruit des villes , d’Amanda Sthers et Pauline Lévêque, éditions Herscher, 108 pages, 20 euros.
Trois questions à Amanda Sthers : « Chacun a une ville qui bat au diapason de son cœur »
Amanda, que représentent les villes pour toi ?
Les villes sont à la fois un lieu de vie, comme une ruche active, et un endroit où l’on peut se sentir très seul. C’est comme dans une fête, il y a des musiques qui nous rendent mélancoliques, qui nous poussent à nous cacher sous une table et d’autres qui nous font danser dessus et tendre la main. Chacun a une ville qui bat au diapason de son cœur, encore faut-il la trouver…
Que recherches-tu dans les villes ?
Une partie de moi qui se révèle. On est différent selon l’environnement dans lequel on évolue. Je pense que je cherche toujours une chose qui fasse appel à un souvenir enfoui dans mon inconscient, comme si j’avais pu vivre une vie antérieure partout où je pose les pieds.
Si tu devais choisir : ville ou campagne ?
Il y a des villes magiques comme Marseille, Naples et même Los Angeles où je vis, qui mêlent un vrai urbanisme et la poésie de la vie sauvage… Ce sont les villes qui me ressemblent le plus… J’aime la campagne mais j’ai besoin des gens, du partage, la ville me manque très vite.
Recueillis par P.H.