La loi de 1905 de séparation des Églises et de l’État a 117 ans, un temps certainement encore trop court pour qu'elle soit parfaitement assimilée partout, même le jour du 11-Novembre.

En effet, il est de tradition (républicaine ?) à Chartres de faire passer le protocole officiel d’hommage aux morts des guerres mondiales par un TE DEUM dirigé par l’évêque dans la cathédrale… C’est juste avant ce moment-là que j’ai quitté le cortège officiel où je représentais le Conseil régional, tout comme M. Lemoine d’ailleurs, mon homologue au Conseil départemental.

Le secrétaire général de la préfecture, le député Guillaume Kasbarian, et le maire Jean-Pierre Gorges n’ont pas hésité, quant à eux, à pénétrer dans l’édifice catholique en y entraînant d’ailleurs les jeunes du SNU (Service National Universel), les jeunes sapeurs-pompiers et les tout nouveaux membres du conseil municipal de la jeunesse...

A l’explication de mon départ, le maire m’a rétorqué : « Nous n‘écoutons pas les mêmes messes... »

Alors, de deux choses l’une, selon moi et selon les principes laïques : abandonnons sans tarder cette étrange habitude (qui n’existe, après vérification, dans aucune des autres préfectures de la région), ou bien visitons chaque année un lieu de culte différent à la suite du sanctuaire catholique : synagogue, mosquée, temple, et …rien (pour les athées). La souffrance et la mémoire ne peuvent être l’exclusivité d’une religion dite dominante ou historique, c’est intolérable.

Je vous invite simplement à relire le poème d’Aragon, La rose et le réséda :

Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Tous deux adoraient la belle
Prisonnière des soldats
Lequel montait à l'échelle
Et lequel guettait en bas
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Qu'importe comment s'appelle
Cette clarté sur leur pas
Que l'un fut de la chapelle
Et l'autre s'y dérobât
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Tous les deux étaient fidèles
Des lèvres du coeur des bras
Et tous les deux disaient qu'elle
Vive et qui vivra verra
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Quand les blés sont sous la grêle
Fou qui fait le délicat
Fou qui songe à ses querelles
Au coeur du commun combat
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Du haut de la citadelle
La sentinelle tira
Par deux fois et l'un chancelle
L'autre tombe qui mourra
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Ils sont en prison Lequel
À le plus triste grabat
Lequel plus que l'autre gèle
Lequel préfère les rats
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Un rebelle est un rebelle
Deux sanglots font un seul glas
Et quand vient l'aube cruelle
Passent de vie à trépas
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Répétant le nom de celle
Qu'aucun des deux ne trompa
Et leur sang rouge ruisselle
Même couleur même éclat
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
Il coule il coule il se mêle
À la terre qu'il aima
Pour qu'à la saison nouvelle
Mûrisse un raisin muscat
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n'y croyait pas
L'un court et l'autre a des ailes
De Bretagne ou du Jura
Et framboise ou mirabelle
Le grillon rechantera
Dites flûte ou violoncelle
Le double amour qui brûla
L'alouette et l'hirondelle
La rose et le réséda.

Jean-François Bridet, vice-président du conseil régional du Centre Val-de-Loire.