Le 11 septembre 2001, j’étais en prison, rue des Lisses, pour …consulter quelques prévenus dans le cadre de ma mission de rééducation et soins parmi les sportifs et les travailleurs « en milieu fermé » de la maison d’arrêt. Je suis arrivé à l’infirmerie, et j’ai trouvé un surveillant en train de regarder la télé. Je lui ai simplement demandé : « C’est quoi ton film ? » Il m’a répondu : « Ce n’est pas un film, ce sont les infos. »
Je ne l’ai pas cru. Pour prouver sa bonne foi, il a changé de chaîne qui diffusait les mêmes images en boucle. J’étais sidéré, interrogatif, ne sachant plus si j’étais dans le réel, si je devais croire ou ne pas croire, et au bout de quelques minutes, j’ai accepté la réalité que j’avais devant les yeux. J’ai connu la même sensation de vide cérébral, d’incompréhension et de déni, en voyant inopinément l’incendie de Notre-Dame de Paris. La seule différence, c’est que pour Paris, j’étais touché plus profondément et viscéralement que pour les Twin Towers. Sans doute par assimilation à la cathédrale de Chartres. Ce qui est plus près nous touche toujours plus.

*

Il est 14 heures 30 en France. Je suis à la maison d’arrêt de Chartres où j’exerce mon métier d’infirmier. Mon collègue kiné arrive et m’annonce le premier attentat. Nous allumons la télévision pour voir les images qui sont diffusées sur toutes les chaînes. Nous entendons des cris de joie dans toute la maison d’arrêt. Dans la cour de promenade, des détenus maghrébins chantent et dansent. Ceux-ci crient que le grand Satan est mort !
16 heures 30 française, il est 10 heures 30 à New York, le deuxième avion frappe la seconde tour du Word Trade Center. Je suis scotché devant le poste de télé. De l’infirmerie, nous entendons les cris de joie redoublés dans les différentes cellules, les détenus frappent violemment aux portes et scandent Oussouma ben Laden, le grand Satan américain est mort !
17 heures, c’est le moment de la distribution des traitements. Je constate la joie sur certains visages, mais aussi l’inquiétude d’autres détenus, qui craignent pour leur sécurité. J’ai dû modérer la joie de certains et en rassurer d’autres.
J’ai quitté la maison d’arrêt vers 17 heures 30. De retour chez moi, j’ai pu voir à la télévision la chute des deux tours, ainsi que l’avion qui s’écrasait sur le Pentagone. J’étais horrifié ! Pourquoi tant de haine ?

La mémoire du « 9-11 » (1)
La mémoire du « 9-11 » (2)
La mémoire du « 9-11 » (3)
« 9-11 »
Il y a 19 ans…