Patrick Modiano poursuit inlassablement son œuvre basée principalement sur le jeu de mémoire. Avec son style littéraire, ancré dans une prose poétique, il publie son 31e roman. La danseuse est une nouvelle occasion pour Modiano d’aller à la recherche des jours heureux ou non.

Avec cedernier livre, le Prix Nobel de littérature 2014 nous entraîne sur les pas d’une danseuse dans le Paris du début des années soixante-dix. Des rues, une route, une maison, des appartements, des numéros de téléphone de l’autre siècle sont l’occasion pour la narrateur de replonger dans les souvenirs souvent enfouis. Des souvenirs qui remontent à la surface quelques cinquante bonnes années plus tard.

L’énigmatique danseuse est l’astre qui fait tourner autour d’elle les hommes, des femmes et son fils Pierre. Le narrateur, fasciné par cette personne avec laquelle il entretient une douce amitié, tente de remonter le fil de ses souvenirs pour mieux comprendre ce qu’il a vécu au cours de cette période. En tirant sur le fil invisible qui relie les hommes, il parvient à reconstituer quelques bribes de vie, des lieux, des rencontres, des atmosphères. La danseuse est un être qui le fascine. Il la regarde vivre tout en cherchant à savoir d’où elle vient et ce qui l’a poussée à danser. Au fil de la lecture, on apprend peu de choses sur son passé, ses rencontres louches, le père de son enfant ou ceux qui l’ont harcelée dans le train.

Avec ce livre, le romancier nous invite à garder au fond de nous « ce présent éternel ». Celui qui s’est inscrit dans notre mémoire à jamais sans chercher à comprendre les événements qui nous ont façonnés dans notre jeunesse : « Je croyais que leur souvenir me venait comme la lumière vous vient d’une étoile morte il y a mille ans, selon les mots d’un poète. Mais non. Il n’y avait pas de passé, ni d’étoile morte, ni d’années lumière qui vous séparent à jamais les uns des autres, mais ce présent éternel. »

Comme toujours, Modiano nous laisse dans des endroits en demi-teinte bercéspar une écriture magique et si rare. A chaque roman, il arrête le temps et c’est si agréable !

Pascal Hébert

La danseuse, de Patrick Modiano, éditions Gallimard, 96 pages.

Photographie Francesca Mantovani.