Jennifer Richard a entrepris avec son livre Il est à toi ce beau pays un retour sur la colonisation africaine aux XIXe et XXe siècle. Ce roman, basé sur des faits réels avec des personnages liés à cette histoire, fait – disons le tout de suite – froid dans le dos. Entre les découvreurs et les chefs d’États transformés en esclavagistes et pilleurs, c’est tout un continent qui a été sacrifié au nom de la « civilisation ». Deux siècles plus tard, les grandes nations continuent à tour de rôle de ponctionner les richesses de l’Afrique. Après l’Europe et les États-Unis, c’est au tour de la Chine de mettre les pays africains à terre pour mieux continuer le pillage et asseoir son autorité. Les États-Unis ne se sont toujours pas remis de cet apport de population noire toujours vouée aux basses œuvres.
C’est par la focale d’Ota Benga, pygmée et bête de foire, que Jennifer Richard entreprend son récit. Présenté dans les foires à côté des animaux, Ota Benga est l’exemple même d’un homme à qui l’on a retiré toute son humanité pour le classer aux rayons des animaux exotiques. Tout ce roman en dit long sur la supériorité des blancs au cour de ces deux siècles de la révolution industrielle. Il en dit long également sur le cynisme des États prêts à toutes les ruses et bassesses pour imposer leur loi auprès des habitants qui n’avaient rien demandé. Avec force et détermination, Jennifer Richard a créé une fresque imposante et sans concession de la colonisation de l’Afrique. Sous prétexte de vouloir civilisé ces pauvres Africains sans foi ni loi, l’Europe a envoyé ses militaires, missionnaires et explorateurs pour mieux asservir une population et la dépouiller de ses richesses naturelles.
Au fil des pages, Jennifer Richard met en avant certains personnages comme Léopold II, le « saigneur » du Congo, le pasteur George Washington Williams, l’aventurier David Livingstone, Joseph Conrad, Henry Morton Stanley ou encore Pierre Savorgnan de Brazza. La romancière met en plein jour la face la plus sombre de l’Occident colonialiste. De la ruée vers l’or des pays africains en passant par la ségrégation aux États-Unis, ce livre rappelle le destin tragique d’un continent toujours malmené.
Il est à toi ce beau pays est le quatrième roman de l’écrivaine franco-américaine Jennifer Richard, qui nous ouvre les yeux sur cette norme imposée au XIXe siècle qui est l’infériorité raciale pour justifier esclavage et colonisation. Un livre pour ne pas oublier !
Pascal Hébert
Il est à toi ce beau pays, de Jennifer Richard, Pocket, 836 pages.