Stéphane Mourad, professeur de Lettres et militant trotskiste, 48 ans, est mort à l’approche du printemps. Il avait été candidat à l’élection municipale de Chartres de mars 2020 sur la liste Lutte ouvrière, menée par Vincent Chevrollier. Il y a quelques mois, Cactus avait reproduit quelques-unes des analyses et réflexions de ce Beyrouthin d’origine. Il tient à lui rendre hommage en publiant la lettre écrite par un ami très cher à l’adresse de son père.
« Monsieur Mourad,
Permettez-moi tout d’abord de vous adresser mes très sincères condoléances et mes sentiments les plus profonds pour la perte de Stéphane. (…) je vous adresse ces quelques mots, cet hommage, du fond du cœur.
Nous habitions la même résidence. Il était un ami et collègue avec lequel j’avais l’habitude, le privilège, d’échanger sur des sujets très divers. Nous parlions aussi bien de nos proches que de politique et de métaphysique.
Très vif d’esprit et très cultivé, il s’intéressait à de multiples sujets sociétaux. Transdisciplinaire, il établissait des liens, dans ses analyses sur les sociétés, entre auteurs d’origines très diverses et de matières variées. Son approche humaniste nous plongeait dans la disputatio, ce principe du débat contradictoire qui nous oblige à repousser nos limites toujours plus loin.
Je l’ai toujours connu engagé politiquement, syndicalement, socialement et culturellement. Exigeant pour lui comme pour les autres. Au fil du temps, nous prenions goût à nos échanges d’écrits, de livres et de points de vue. Nous avions relu ensemble sa thèse avant édition, nous avions travaillé sur la condition de la femme dans la situation actuelle. Nous avions traduit cela afin de le proposer à des médias anglo-saxons.
Il m’avait soumis une ébauche de roman sur le Liban, imprégné de souvenirs de son enfance et d’actualité. Il étudiait le coréen. Eclectique, plein de projets, il était passionné. Il avait une soif inextinguible de connaissances et montrait un véritable élan pour la réflexion critique sur l’homme.
Tout cela aurait été bien incomplet s’il n’avait pas régulièrement évoqué sa famille dont il se sentait si proche. Il me parlait régulièrement de son papa, à Vernouillet et de sa maman, vers le bassin d’Arcachon, de son frère aussi. Il était fier de m’en parler ! De ce que vous avez fait.
L’an dernier, quand il fut hospitalisé et qu’il en réchappa, il se mit à développer un grand intérêt pour la métaphysique. Nous continuions à discuter politique. Seulement, cette dimension nouvelle vint habiter nos rencontres. Et il lut mains textes sacrés des trois religions du Livre. Il fallait qu’il cherchât et qu’il comprît même l’indicible. La quête devenait infinie.
Puis, survint ce drame, par nature injuste et absurde. Si jeune et …
Voilà, ses amis sont très touchés, je suis très touché. Nous tenons, je tiens, à vous exprimer toute notre compassion.
Si l’avenir nous réunit, je serais très honoré de ce partage. (…). »
Yves Terrades
Chartres, espace urbain dominé
Réflexions en enfer (1)
Réflexions en enfer (2)
Réflexions en enfer (3)
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Réflexions en enfer (6)
Réflexions en enfer (7)