Jean-Pierre Gorges s'est mis dans la tête qu'il faut valoriser les thermies perdues, dites calories "fatales" après toute autre utilisation, par l'incinération des ordures ménagères. Excellente idée, au demeurant ! Mais que lui et ses prédécesseurs n'y aient pas pensé plus tôt, on ne peut que s'en étonner...

Mais il veut, dans cette démarche, occuper le devant de la scène en développant un projet "unique en France" (c'est faux, mais passons...). Le projet consiste à installer 4 hectares de serres maraîchères à proximité de l'usine d' incinération à Seresville, serres qui utiliseraient une partie de l'eau chaude produite jusqu'ici en pure perte afin de produire des tomates toute l'année.

Il s'agit donc d'une production "hors sol", dite culture hydroponique permettant d'obtenir 500 à 600 tonnes de tomates par hectare et par an, soit 2 200 tonnes environ de production annuelle, récolte étalée de mars à novembre.

Évidemment, le modèle retenu est typiquement dans une logique industrielle, le débouché ne pouvant être que l'approvisionnement d'une unité de transformation agro-alimentaire : une "ratatouillerie" serait prévue !

Le projet est déjà bien avancé puisqu'un industriel de la région nantaise est sur les rangs (il possède d' autres unités de ce type dans le secteur Nantes-Ancenis), et le projet "Seresville" a été conçu selon un business-plan établi par ses soins. Des élus chartrains ainsi que des fonctionnaires de la Ville ont bénéficié d' un voyage d'études dans ses installations.

Comme toutes les élucubrations gorgiennes, ce machin est une ânerie monumentale (une de plus...) :

- c'est l'antithèse des circuits courts actuellement préconisés, une monoculture générant un tel tonnage entraîne forcément de longs déplacements d'un produit fragile jusqu'à l'unité de transformation et jusqu'aux zones de consommation.

- c'est la reproduction à l'identique d'un modèle de production très ancien qui a déjà donné toutes les preuves d'un  fonctionnement aberrant ("colonisation" de la côte nord de la Bretagne au Pays de Léon par les productions Savéol aux qualités (?!) gustatives unanimement appréciées...; même exemple de 8 hectares en banlieue d'Egletons (Corrèze) : production TOTALEMENT artificielle, consommatrice d'énergie pour produire À CONTRE SAISON, monoculture fragile qui nie toute biodiversité.

- alors que le travail d'institution du Plan Alimentaire Territorial de l'agglomération est bien engagé (l'étude d'analyse du territoire est achevée), ce projet délirant s'inscrit à l'opposé des préconisations visant à l'autonomie alimentaire de la zone considérée. Cette autonomie exige en équivalent/surface 50 000 hectares de productions DIVERSIFIEES au maximum. L'agglomération couvre 66 000 hectares de surface cultivée, mais dédiée a de quasi monocultures : blé, colza, maïs, productions "exportées" en quasi totalité, et on viendrait y rajouter une autre monoculture inutilisable sur place...

- la cuisine centrale de Chartres utilise 7 tonnes de tomates par an, soit 0,3 % de la production annoncée. L'industriel n'a aucun intérêt à diversifier le conditionnement et la logistique prévus pour satisfaire un client aussi modeste.

- une telle installation viendrait ajouter une touche supplémentaire à l'orientation agricole de la Beauce, orientation qui arrive à bout de souffle, dérives climatiques aidant, à savoir focalisation cinquantenaire sur un très faible éventail de productions (blé, maïs, colza), rareté des unités de transformation (en deux ans, un grand moulin a fermé à Chartres et la distillerie de Janville a cessé toute activité en 2021), soit une économie agricole locale de structure primaire comme dans les pays du tiers-monde. Une unité de production dédiée à une culture légumière intensive serait donc dans la lignée de cette vocation mono-produit.