« Vous avez sans doute entendu parler de la crise qui secoue Gasville-Oisème. Son Maire élu démocratiquement a tenté de démissionner sous la pression insidieuse d’une partie de son conseil municipal. » Voici les termes de la lettre adressée le jeudi 23 novembre par le Président de l’agglomération aux conseillers communautaires, qui se termine ainsi : « C’est pourquoi je vous exhorte, avec vos adjoints, à venir en soutien de notre collègue […] »

Le Code électoral précise que les élections municipales permettent d'élire les membres du Conseil municipal de chaque commune : les conseillers municipaux. Ils sont élus au suffrage universel direct pour un mandat de six ans. Les électeurs n’élisent pas directement un maire, mais une équipe de conseillers municipaux qui composent le Conseil municipal. Ce sont ensuite les conseillers municipaux qui élisent le Maire. Le pouvoir ne revient pas à une personne qui représente la fonction de Maire, mais bien au Conseil municipal.

Dans la lettre que le Président de l’agglomération adresse aux élus communautaires, il semble oublier que le pouvoir de chaque commune n’est pas incarné par le seul Maire. Au-delà du ton autocratique « je vous exhorte », cette lettre symbolise la vision passéiste du chef, comme le seul décideur. Elle nie le pouvoir démocratique et collégial d’un conseil municipal.

La libre administration des collectivités territoriales, garante des libertés locales, est un principe constitutionnel. La notion de libre administration est présente dans deux articles de la Constitution :

  • l'article 34 (alinéa 13) dispose que : « La loi détermine les principes fondamentaux [...] de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources » ;
  • l’article 72 (alinéa 3) précise que « dans les conditions prévues par la loi, ces collectivités s’administrent librement par des conseils élus et disposent d’un pouvoir réglementaire pour l’exercice de leurs compétences ».

L’origine de la discorde interne vient de la décision du Maire de Gasville-Oisème de retirer les délégations de son adjoint à l’environnement, Grégoire Bailleux, puis sa proposition de lui retirer son titre d’adjoint, décision qui doit être votée à la majorité du conseil. Lors du conseil municipal suivant, les conseillers, à l’exception du maire évidemment, se sont tous exprimés en faveur du maintien du titre d’adjoint à Grégoire Bailleux. Depuis cette séance, le premier magistrat de la commune ne dispose plus de majorité au sein de son conseil.

En se permettant de commenter et d’émettre des jugements sur des faits internes à une commune, à un Conseil municipal, qui a pris une décision collective à une large majorité de ses membres, le Président de Chartres Métropole se mêle de ce qui ne le regarde pas. Cette lettre, au ton menaçant, présente un véritable risque d’ingérence* dans la libre administration de la commune de Gasville-Oisème !

Souvenons-nous que le Président de l’agglomération avait déjà eu recours à une forme d’intimidation envers les conseillers communautaires dont les 65 autres maires à l’occasion du relèvement conséquent des niveaux de la fiscalité foncière en décembre 2020.

En cela, cette lettre est insupportable et antidémocratique. Elle revient à remettre en question le choix des habitants de Gasville-Oisème qui ont élu les conseillers municipaux composant le Conseil municipal de cette commune.

Avec la démission groupée des membres du Conseil municipal, et de nouvelles élections municipales partielles à venir vers février 2024, gageons que les habitants sauront faire le choix raisonnable d’une équipe municipale soudée, compétente, capable de défendre leurs intérêts et la quiétude de ce village, afin notamment que les nuisances d’un violent projet d’autoroute ne viennent jamais étouffer le clapotis de la Roguenette.

Olivier MAUPU, Jean-François BRIDET, Quentin GUILLEMAIN, Brigitte COTTEREAU

  • Ingérence : action de s’ingérer, de se mêler d’une affaire ou de toute autre chose sans en avoir l’autorisation ou le droit.