En 2015, Paul Ariès écrivait Écologie et culture populaire pour rappeler que les populations pauvres sont les plus exposées aux nuisances d’un environnement dégradé, alors que leur bilan carbone est faible. Dans le même esprit, mais en s’appuyant sur des enquêtes approfondies dans toutes les catégories sociales, J.B. Comby, en sociologue scrupuleux, examine les attitudes de chaque classe sociale face à l’écologie.

Sans surprise, il confirme que ce sont les classes dominantes qui émettent le plus de gaz à effet de serre tout en faisant l’apologie d’un capitalisme vert. Juste en dessous, la bourgeoisie économique (cadres, commerciaux, artisans) est consciente de la problématique écologique, mais ne modifie que très peu son mode de vie. Les écologistes convaincus les plus nombreux se situent dans la classe qu’il nomme « bourgeoisie culturelle », mais sont souvent stigmatisés comme extrémistes, écolos bobos, lorsque leur mode de vie est dicté par une attention de tous les jours à la sobriété et au respect de la nature.

La classe populaire, la plus nombreuse, est confrontée aux injustices écologiques et est bien consciente des problèmes, mais elle doit en priorité faire face aux réalités matérielles : « la fin du mois avant la fin du monde ». Le capitalisme vert prospère en oubliant les premiers de corvée, nous dit J.B Comby, et cette politique risque bien de provoquer dans l’avenir un ressentiment amer de celles et ceux qu’elle laisse de côté. Il déclare : « c’est ce drame qui devrait être crié sur tous les toits pour générer de forts sentiments d’injustice et de colère ! »

Pour terminer son essai, le sociologue propose tout un programme : s’attaquer à supprimer les logiques de concurrence, réduire les écarts de salaires, diminuer le temps de travail, sécuriser les parcours scolaires, renforcer les services publics de proximité, encourager la vie associative et investir dans le logement social.

On comprend que Jean-Baptiste Comby est un écologiste convaincu, mais aussi et surtout un sociologue de gauche ! Cet ouvrage souffre d’un langage un peu trop sociologique, mais reste très intéressant et mérite une large diffusion pour ceux qui voudraient s’employer à rallier les classes populaires à la cause écologique.

Denys Calu

Jean-Baptiste Comby, Écolos, mais pas trop…, les classes sociales face à l’enjeu environnemental, éditions Raisons d’agir, 151 pages, 2024, 14 euros.