Peut-on marcher dans Chartres, regarder cette ville avec attention, échanger avec les gens sans être inquiet ? Petit relevé de choses vues et vécues.

La chapelle Saint-Eman

On s’était habitué à ses mosaïques, dont les expositions, consacrées à des artistes de partout, se succédaient. La municipalité n’avait-elle pas décrété un temps  que la mosaïque, c’était un art emblématique de Chartres ? Merci, monsieur Picassiette.

Aujourd’hui, il n’y a plus sur sa façade que le calicot annonçant le programme de l’an dernier.

Déjà, la salle n’était plus ouverte que les fins de semaine. Y a-t-il un programme en vue ?

A la Collégiale Saint-André : les marchands du temple

Samedi 27 janvier, avant 9 heures : une longue file s’étend des grilles au pont, de gens bien sages. Un jeune homme, qui s’achemine lui-même vers la foule, m’apprend que c’est une vente de vêtements « de marque »  à prix cassés. Une heure plus tard, la file traverse l’Eure et s’allonge en direction de la passerelle, formant une boucle encore immobile. L‘accès se mérite, apparemment.

Ô souvenirs du temps où Amnesty organisait à la Collégiale sa vente annuelle, où les Clavecins de Chartres donnaient des concerts inoubliés.

La fripe, c’est quand même inattendu. Cela rapporte, suppose-t-on - à qui, exactement ? Sinon, la Ville n’eût jamais concédé le lieu. Les gérants du centre ville qui ferment boutique parce qu’ils sont étranglés apprécieront.

Les fermetures, parlons-en...

Au cours de l’année écoulée, combien d’adresses appréciées ont baissé le rideau ? A chaque fois, ceux qui partent ne cachent pas leur amertume. Toujours les mêmes regrets : loyers prohibitifs, droits de terrasses (et de pots de fleurs !) sans merci, concurrence d’enseignes mondialisées qui banalisent les rues et les places, ou encore voies condamnées pour cause d’interminable péril.

On en arrive à craindre de ne pas retrouver ses commerçants les plus discrets et dévoués. « Ma Ferme en ville », qui faisait partie du paysage, qui unissait le principe du circuit court à une production biologique soignée, n’a pas tenu le choc. Pas si facile de trouver portes closes un matin, sans avoir su deviner le désarroi d’une maraîchère qui ajoutait toujours un bouquet de basilic dans votre panier.

C’est ce qu’il faudra, sans tarder, réhabiliter : une forme de service réciproque, de pacte client/producteur, qui est affaire d’estime et de travail bien fait plus que de profit.

Dans cette ville dont la publicité s’étale un peu partout, où le logement type airbnb prospère, des rues sont pourtant devenues quasi sordides, entre étais à durée indéterminée et bitume ravaudant un sol d’où les pavés se sont descellés. D’évidents signes que le bien-être et l’épanouissement des habitants sont le cadet des soucis de ceux qui pilotent ce navire. Pilotage à vue qui sème les monstres de béton. Nature et culture repasseront : pas de quoi être tranquille.

C.V.