Cactus a interviewé sous couvert d’anonymat un cadre d’une association caritative de l’agglomération chartraine. Son bilan de la grande pauvreté dans la capitale de Beauce devrait interpeller les responsables politiques locaux et nationaux.

1. Quel est le nombre de personnes en grande difficulté sociale dans l’agglomération chartraine ? Et quelle est son évolution ?

L’évaluation est difficile à réaliser, car nous ne comptabilisons que les personnes qui font appel à nous. Elle est probablement très minorée, à cause de plusieurs freins (psychologiques, impossibilité de se déplacer, compréhension insuffisante, etc.). Pour faire court, environ 2 500 personnes reçoivent une aide alimentaire en été, 30 à 50% de plus en hiver. Tous ces gens sont, selon nos barèmes (qui sont secrets), bien en-dessous du seuil de pauvreté.

2. Quel est le profil des gens en souffrance sur Chartres (jeunes, migrants, personnes âgées, personnes isolées, femmes, etc) ?

Tous ces cas sont représentés, assez régulièrement répartis, sans oublier des hommes récemment séparés de leur compagne. Les migrants circulent beaucoup dans la région, certains souhaitent néanmoins se fixer à Chartres. Certains de nos bénéficiaires sont issus de l’immigration (deuxième génération, regroupements familiaux).

3. Quelles sont les besoins les plus urgents ?

L’alimentation, bien sûr, mais ce n’est primordial que pour une minorité : on ne meurt pas de faim, les aides sociales jouent leur rôle. L’aide permet d’économiser sur le budget alimentation, pour consacrer cet argent à rembourser une dette, ou assurer d’autres dépenses (habillement, équipement, frais liés aux enfants). Les soins sont en général bien pris en charge, sauf pour certaines spécialités (dentisterie, acoustique, lunettes…). Le logement est bien pris en charge par l’allocation logement, qui a néanmoins diminué, beaucoup plus que les quelques euros qui avaient été annoncés. C’est plutôt 30 euros de moins par mois, ce qui est lourd pour les petits budgets. En outre, il y a des abus dans le secteur locatif privé (loyers excessifs, vétusté) et quelques marchands de sommeil.

4. Quelles sont les structures les plus investies pour leur venir en aide ?

Les Resto du coeur, le Foyer d’accueil chartrain (FAC), la Croix Rouge (ces trois-là gèrent alternativement la maraude à destination des SDF, dont le nombre varie selon les saisons), Epicerie sociale, Secours catholique, Secours populaire, Compagnons du partage, AERESP (sans-papiers), Intermarché, Lions Club. J’en oublie certainement.

5. Quelle réforme permettrait d’améliorer la situation ?

Une réforme fiscale permettant de mieux financer les aides sociales me semble indispensable. L’accès facilité au jardinage permettrait à certains volontaires une alimentation de meilleure qualité (un projet de chantier d’insertion à Chartres devrait se concrétiser l’année prochaine). Surtout, il faut cesser de considérer ces personnes comme des assistées.