Le Maire de Montvilliers apprend vite ce qu'il ne faut pas faire et se laisse griser par un pouvoir qu'il perçoit comme inépuisable et inattaquable. La grande affaire de son mandat, c'est la rénovation urbaine : il faut assainir le quartier de sa ville où vivent beaucoup de familles nombreuses, en difficultés financières, qui cherchent presque tous comment  boucler la fin du mois.

Assainir, c'est nettoyer brutalement un parking où les habitants réparent des vieilles voitures, un atelier clandestin donc ; assainir, c'est aussi faire évacuer un immeuble, le bâtiment 5 , après un incendie dans un des appartements, restaurant clandestin sans doute, pour détruire et reconstruire des logements où il fera bon vivre. Le Maire est responsable du bien-être, de l'ordre public et de la sécurité de tous ses concitoyens. C'est ce qui se répète dans toutes ses prises de parole.

Notre maire fictif, puisque nous sommes ici dans le film de  Ladj Ly, Bâtiment 5, a d'après sa femme une vision "romantique" de sa fonction... Mais ce romantisme  bien mal nommé est très vite enfoui sous la peur d'affronter l'autre et ses différences ; sous la lâcheté qui lui fait nier que la cité en question a été négligée pendant des années menant à  sa dégradation ; sous la mauvaise foi quand on lui rétorque que les nouveaux logements, trop petits, ne pourront recevoir des familles nombreuses...

Le film n'est pas complètement réussi, trop schématique, un peu didactique,  avec des personnages peu nuancés, parfois peu crédibles . Mais les images restent aussi impressionnantes que dans le premier film de Ladj Ly Les Misérables.  Restera dans les mémoires la séquence de l'évacuation, sans aucun pathos, mais d'un réalisme qui cloue dans son fauteuil le spectateur.

Il restera aussi la démonstration du mécanisme faussé de ce qu'on appelle la rénovation urbaine et la figure de la jeune Haby, qui résiste. Le film est à l'affiche à Chartres...

(Illustration : Marseille, quartier de la Plaine, 2019).