Nous sommes le lundi 23 mars 2020, 21 heures, le Premier ministre termine son intervention au journal de 20 heures de TF1. La France est confinée chez elle depuis une semaine. Après un temps de déni, les Français prennent majoritairement la mesure de la gravité de la situation. Le virus plonge les patients en détresse respiratoire, certains d’entre eux décèdent (plus de 1 100 l’heure qu’il est). La France est à bout de souffle.
Édouard Philippe a dû préciser certaines mesures pour qu’elles soient mieux respectées, et décréter de nouvelles pour répondre plus durement à la situation. Une mesure retient l’attention : les marchés ouverts seront fermés jusqu’à nouvel ordre. Bien sûr, une dérogation sera possible pour les campagnes isolées sans autres solutions raisonnables pour s’approvisionner.
Comme partout en France, à Chartres, le marché a été maintenu le dernier week-end. Il a été délocalisé sur la place des Épars pour espacer les stands et tenter de garder les distances de sécurité sanitaire. Deux jeunes médecins s’y sont rendus. Ils constatent que les conditions sanitaires ne sont pas suffisantes, ils tentent d’alerter les gens du danger et leur demandent de rester chez eux. C’est un cri de colère et d’alarme. Les personnels soignants risquent leur vie tous les jours pour nous, ils sont fatigués, l’hôpital du Coudray est à bout de souffle.
Ils ne sont peut-être pas assez pédagogues : ils sont humains. Leur intervention finit en altercation avec les commerçants.
L’un des deux médecins a fermé son cabinet pour se consacrer entièrement à l’unité de soin ouverte à l’hôpital du Coudray, afin de désengorger les urgences. Il le fait bénévolement au péril de sa vie, sans rien demander d’autre qu’aux gens de rester chez eux. Mais crime de lèse-majesté, ce médecin a fait partie aux dernières municipales d’une liste d’opposition « Osons Chartres autrement », soutenue par LREM.
Nous sommes en guerre sanitaire contre un ennemi invisible qui occupe tout le territoire. L’union sacrée est déclarée, c’est le temps de la solidarité. Tout le monde l’a compris, tout le monde sauf une personne : notre maire, président des hôpitaux de Chartres.
Cela fait une semaine qu’il rumine les conditions de sa réélection. Il a évité le camouflet d’un deuxième tour, pour seulement 27 petites voix. Il a enfin trouvé un punching-ball, ce sera ce jeune médecin.
Dans un premier temps, Jean-Pierre Gorges le fustige par voie de presse. Le médecin a tenté un coup politique, il n’y voit qu’une manœuvre politicienne.
Et, coup de grâce porté ce mardi 24 mars, le maire de Chartres demande à la préfète d’Eure-et-Loir une dérogation pour le maintien des marchés sur la commune (plus de 38 000 habitants).
Pour soigner son ego fraîchement écorné, le maire de Chartres n’hésite pas une seule seconde à créer une polémique là où il faudrait créer de la solidarité, et, plus grave encore, il risque d’exposer ses administrés à un virus que nous ne savons pas traiter efficacement.
Le mandat va durer encore six ans et le maire de Chartres semble déjà à bout… de souffle.