Parking et ornement. La séance commence par la présentation par le cabinet Intencité du diagnostic de l’offre commerciale chartraine. Présenté à l’issue d’une enquête d’opinion en ligne sur démarche volontaire auprès des consommateurs et complété d’entretiens avec les commerçants, le bilan, oh surprise, est des plus flatteurs. Mme Mokhtar, commerçante élue de la majorité, est lapidaire à l’issue du docte exposé : « Soyons humbles, satisfaisons-nous de ces résultats », ce qui permet au maire de rétorquer : « Je suis content que ma commerçante préférée soit contente ! ». Le dossier avait bien avancé !

Olivier Maupu est ensuite moqué lorsqu’il regrette de ne pas disposer de l’évolution des données sur ces dernières années pour évaluer les dynamiques en œuvre avant que je ne mette en lumière la seule nuance apportée ce soir au monde merveilleux du commerce chartrain : le stationnement. En effet, la ville met à disposition des consommateurs une place de stationnement pour 11m² de surface commerciale, au lieu du ratio d’une place pour 25 m² constatée en moyenne dans les villes de taille équivalente. Pourtant, les difficultés de stationnement sont identifiées par l’étude comme le principal frein à la fréquentation du centre-ville ! Au représentant du bureau d’études qui évoque le possible défaut de visibilité des parkings souterrains (ne riez pas !), j’oppose l’argument du prix prohibitif de celui-ci, ce qui lance J-P Gorges dans son premier monologue fondé sur la saturation des parkings en question et sur la nécessité d’en créer plus encore :

  • « Nous ne sommes pas des méchants écolos qui veulent tuer les voitures et je crois plus à l’atome qu’aux bio-carburants. »
  • « Le commerçant doit payer le stationnement de son client. Quand vous allez au restaurant à Paris, quelqu’un prend vos clés pour aller garer votre voiture dieu sait où, et vous ne payez rien ! »

Cette première heure consacrée au bilan de l’offre commerciale chartraine est conclue par le maire qui commente ainsi l’enchaînement vers l’étape prospective de l’étude dont il semble douter de l’utilité : « Je ne sais pas si nous pourrons faire mieux que cela ! »

Le vote du budget, plat de résistance de la soirée, s’offre ensuite à nous après le sérieux exposé de Franck Masselus. Sous les rires à peine étouffés d’une partie des conseillers de la majorité, Brigitte Cottereau explique calmement la position de Chartres Ecologie qui souhaiterait voir prioriser la rénovation et le développement des équipements et services de proximité plutôt que l’accélération à marche forcée d’investissements inutiles mais de prestige, ou remplacer les 500 000 euros annuels de maintenance du système de vidéosurveillance par dix agents de proximité. Un sobre mais dorénavant habituel « Merci pour votre intervention » lui est adressé en retour par J-P Gorges.

Aux questions que je pose ensuite à M. Masselus pour obtenir du détail au sujet de certains investissements, le maire dit à son adjoint aux finances : « c’est moi qui réponds ». J’obtiens alors les éléments suivants :

• Malgré le plan de la ZAC du plateau Nord-Est qui la condamne (comme Chartrexpo, le CRJS et la gendarmerie), – puisque cette ZAC d’un autre temps prévoit le déplacement d’ici 2030 de ces équipements pour permettre de légèrement dévoyer l’avenue Jean-Mermoz -,  on continue à investir dans la halle Jean-Cochet qui survivra quelques années à la livraison du pôle sportif et culturel de la gare.
• Les 175 000 euros affectés à la butte des Charbonniers sont destinés à sa mise en lumière.
• Le remplacement du système de chauffage de serres des services d’espaces verts pour 300 000 euros n’a pas été l’occasion de s’interroger sur la pertinence environnementale et économique de conserver ces méthodes culturales. Là où nous voyons s’exprimer un choix politique (ou plutôt un non-choix), le maire ne répond que par la compétence des horticulteurs et des techniciens en génie climatique…
• Le bouquet final répond au souhait que j’exprime de ne pas précipiter démolitions et abattage d’arbres sur le site du parvis de la cathédrale pour un projet méconnu et sans autorisations à ce jour, 200 000 euros étant déjà budgétés pour cette politique de la terre brûlée. J’ai à nouveau appuyé sur le bouton « haine des arbres ».

Et M. Gorges de se lancer : « Les arbres sur le parvis, on se demande bien ce qu’ils font-là, posés n’importe comment… Et après, ça donne à certains l’idée d’en faire en forêt face à la cathédrale ! » (…) « S’il faut des arbres pour refroidir la planète, plantez-les dans les champs en pleine Beauce » « Notre politique ça n’est pas de mettre des arbres dans la ville, mais de mettre les habitants dans la ville » « Au lieu de demander aux autres de planter des arbres, faites-le chez-vous ! » « Le projet de l’aménagement de l’esplanade de la cathédrale a déjà été présenté à la commission nationale du patrimoine, il existe ce projet, à vous de le chercher et de vous instruire. Il y a déjà eu de projets de présentés, des maquettes des films… Maintenant, sur ce projet, je ne vous répondrai plus. » Et le plus beau pour la fin : « les arbres dans la ville c’est comme les plantes vertes en appartement : de l’ornement ».

Je confesse n’avoir pas trouvé l’énergie de redemander la parole pour lui rappeler que l’arbre en ville, climatiseur naturel, est la seule arme connue contre les îlots de chaleur et pour le confort urbain.

Quentin Guillemain achève nos interventions relatives au budget par la proposition d’un amendement visant à réduire de moitié les frais de réception municipaux et de représentation du maire, vraisemblablement inutiles en ces moments de couvre-feu et de mesures sanitaires renforcées (visioconférences, distanciation) pour réaffecter les sommes en question au CCAS qui devra faire face à de nombreux cas de détresse sociale engendrés par les conséquence à venir de la crise sanitaire. D’abord saluée comme un noble acte d’animation du débat démocratique, cette initiative est ensuite tournée en dérision par le maire et Ladislas Vergne, président du CCAS, qui la qualifient de populiste (« l’action sociale, ça n’est pas distribuer des billets de banque ») et qui l’interprètent comme une attaque contre le dévouement et la compétence des personnels de l’action sociale !

Face à cette nouvelle manipulation, je demande à l’exécutif, toujours sur la défensive, de cesser d’interpréter nos critiques de son action politique comme une mise en cause du travail des services municipaux. F. Masselus avait déjà répondu à mes remarques relatives au budget en s’indignant que je mettre en cause le travail considérable mené d’arrache-pied depuis septembre 2020 pour bâtir ce projet. Je lui rappelle utilement que ce travail n’est au service que de la politique décidée par la majorité, que je suis en droit, si ce n’est au devoir, de critiquer.

J-P Gorges clos le débat en indiquant que le contexte épidémique ne génère aucune économie en matière de réception et de représentation, les coûts tendraient même à être plus élevés (le prix des traiteurs à domicile… !).

De façon très classique lorsqu’il s’agit d’aide sociale, ceux qui n’en manquent pas déclament que « l’argent ne fait pas le bonheur ». Jacqueline Marre rappelle alors utilement à l’exécutif que la plupart des gens ne vivent pas que de l’air du temps !

Une fois n’est pas coutume, cet amendement recueille tous les suffrages des conseillers « d’opposition ».

La délibération relative à l’octroi d’une subvention de 60 000 euros pour l’organisation du TOP 16 des clubs d’échecs étant retirée en raison de l’annulation de l’évènement pour cause sanitaire, je n’ai pas le loisir de mettre en cause les 80% de financement public de cet évènement qui, en 2019, n’avait pourtant coûté que 1 000 euros à la ville de Brest, tout en dégageant un bénéfice de 16 000 euros à la fédération française d’échecs.

Nous finissons par la présentation d’une douzaine d’ORI (opérations de restauration immobilière) en centre-ville dont nous voterons, avec la majorité, le lancement des procédures. Olivier Maupu prend la parole pour regretter que cet indispensable travail n’ait pas été entrepris plus tôt et demander quelques précisions sur les modalités d’identification de certains immeubles ciblés. Plutôt que laisser M. Plaze, rapporteur du dossier, répondre à notre collègue, le maire lui indique que ce type de question est à poser en commission plutôt qu’à tenter d’y répondre rapidement, il se lance dans dix minutes de digressions mêlant l’immigration, la rénovation de son ancienne maison et finissant par la nécessité de créer des « poches » de stationnement dans le centre-ville : « les parkings souterrains vont consolider les immeubles anciens ».

Il est minuit 45, le maire termine comme il a commencé par un hommage au parking tout-puissant : la boucle est bouclée !

Ce soir, j’ai été moqué par le maire pour avoir cité « Gouverner c’est choisir », phrase de Pierre Mendes-France gravé à proximité du lycée Marceau. La suivante aura-t-elle la même postérité ?

« Les arbres dans la ville, c’est comme les plantes vertes en appartement : de l’ornement » (Jean-Pierre Gorges, le 8 avril 2021).

Jean-François Bridet

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