Zénith : "Épargnez-nous !" contrarie (encore) Gorges
L’Association « Épargnez-nous ! » a demandé au Tribunal Administratif d’Orléans d’annuler l’arrêté du 10 juillet 2017 par lequel le maire de Chartres a délivré à Chartres Métropole au nom de la commune, un permis de construire en vue de la construction d’un équipement plurifonctionnel, culturel et sportif au n°28 de la rue de Danièle Casanova ainsi que le permis de construire modificatif délivré le 18 avril 2019. Le Tribunal Administratif d’Orléans a rendu le 26 novembre 2019 son jugement suite à l’audience du 12 novembre 2019.
Le tribunal dans son jugement a retenu « que seul le moyen tiré de l’incomplétude du dossier de demande de permis de construire est de nature à l’annulation du permis de construire du 10 juillet 2017. Seuls les moyens tirés de l’insuffisance de l’évaluation environnementale consacrée au trafic et des conditions de déroulement de l’enquête publique (de février/mars 2019) sont de nature à conduire à l’annulation du permis de construire modificatif du 10 avril 2019 ».
En conséquence, dans son jugement le tribunal considère qu’il y a lieu de faire application des dispositions de l’article L.600-5-1 du code de l’urbanisme et de fixer à dix mois (donc avant le 26 septembre 2020) à compter de la notification du jugement le délai imparti à Chartres Métropole pour justifier d’une mesure de régularisation des vices entachant le permis de construire du 10 juillet 2017 et le permis construire modificatif du 18 avril 2019.
Le tribunal a finalement décidé :
« Article 1er : en application de l’article L.600- 5-1 du code de l’urbanisme, il est sursis à statuer sur les conclusions de la requête de l’association de défense du quartier de l’Épargne pour permettre les régularisations décrites au point 36 dans un délai de dix mois.«
Chartres Métropole devra donc établir une nouvelle évaluation environnementale qui devra comporter notamment une étude de trafic lors de l’utilisation de l’équipement plurifonctionnel culturel et sportif et une analyse sur la capacité des voiries situées à proximité et en informer le public par une nouvelle enquête publique (portant donc sur un nouveau permis modificatif et une nouvelle évaluation environnementale).
Le tribunal n’a pas retenu les moyens que l’avocat de l’association avait également développé dans ses différents mémoires concernant l’insuffisance du stationnement, les nuisances sonores et la qualité de l’air.
En conclusion, l’association considère comme positive son action en justice : le tribunal administratif d’Orléans a mis en avant des manquements significatifs dans le dossier du permis de construire de l’Équipement plurifonctionnel culturel et sportif ; les éléments mis à disposition du public concernant le trafic n’ont pas permis d’assurer une information suffisante de la population.
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« Éviter, réduite, compenser », telle est la doctrine que le maître d’ouvrage se doit de respecter lorsqu’il se lance dans un projet urbanistique… Mais, comme conclut le troisième « commissaire enquêteur » d’une énième enquête publique concernant le projet de l’Équipement Plurifonctionnel, culturel et sportif de Chartres : « tout aménagement dans le domaine public est synonyme de perturbation pour les usagers et les riverains ». Il ajoute que « les préjudices subis par les riverains ne sont pas insurmontables et qu’ils devront faire l’objet de toute l’attention des responsables ».
Si le premier précepte, à savoir : « éviter » les nuisances apportées par le projet de l’Équipement Culturel et Sportif, le dit projet s’inscrivant lui même dans le projet de la ZAC « pôle gare », nous pouvons estimer qu’il est nul et non avenu car la volonté délibérée du maître d’ouvrage a été de détourner les nuisances subies devant la gare vers l’arrière.
Pour le second précepte, à savoir « réduire », là encore il est jugé nul et non avenu, car les nuisances, liées à l’augmentation du trafic, croissent de façon exponentielle, tel que le confirme les deux premières études d’impacts et les avis de l’Autorité environnementale.
Pour le troisième précepte « compenser », la question se pose. Effectivement, devant cette hausse du trafic, hausse de la pollution, des bruits, des besoins de stationnement, comment apporter ces mesures de compensations tant demandées et attendues par les riverains et usagers du pôle gare, si ce n’est en affirmant que l’EPCS fera écran pour les riverains aux bruits générés par le transport ferroviaire alors même que les ¾ des trains s’arrêtant en gare ne génèrent que peu de frottements sur les rails donc peu de bruit ? Comment justifier que les taux de pollution liés au trafic routier seront inférieurs à la limite des taux acceptables alors que le quartier de l’épargne ne subissait, en certains points, aucune pollution liée au trafic routier. Le constat est identique sur l’étude du bruit ?
Ainsi, depuis 2007, l’Association de Défense du quartier de l’épargne n’a de cesse de dénoncer les manquements en termes d’environnement et de qualité de vie des riverains et des usagers du pôle gare.
La Justice, sollicitée à maintes reprises, a une première fois suspendue l’arrêté municipal du 10 juillet 2017 accordant l’autorisation du permis de construire au motif d’absence d’étude environnementale. Le maître d’ouvrage a donc été dans l’obligation de revoir sa copie et a effectué une étude environnementale, accompagnée d’une enquête publique. Du fait de la diminution de la capacité d’accueil du centre culturel et sportif, le commissaire enquêteur, précédemment cité, accorde un avis favorable estimant que toutes les conditions étaient requises. La suspension est alors levée par le Tribunal Administratif d’Orléans début octobre 2019, mais le dossier est encore en suspens jusqu’à l’audience sur le fond qui s’est déroulée le 12 novembre 2019.
Le jugement, rendu le 26 novembre 2019, conclut que l’étude environnementale a tenu compte de l’augmentation du trafic lié à l’Équipement Plurifonctionnel Culturel et Sportif ainsi qu’aux grands projets urbains prévus aux alentours (ZAC Roseraie et ZAC Rechèvres), mais elle interpelle le maître d’ouvrage sur la capacité du réseau routier actuel et à venir (rue du faubourg St-Jean, rue et pont Casanova, voie nouvelle) à absorber une telle augmentation du trafic !
Le Tribunal Administratif ordonne au maître d’œuvre d’effectuer une nouvelle étude environnementale, avec enquête publique, afin de remédier aux vices relevés. Cette étude devra être particulièrement pertinente sur le sujet de la capacité des voiries à absorber le trafic exponentiel. Le Tribunal, accorde au maître d’ouvrage un délai de 10 mois pour apporter les éléments nécessaires qui permettront au Tribunal de statuer définitivement sur la demande d’annulation du permis de construire par l’association de défense du quartier de l’épargne qui estime, au regard des nuisances générées, qu’un tel complexe, jouxtant des zones d’habitations, avec un système de voiries limité et enclavé n’a pas sa place en centre-ville et qu’il devrait s’implanter à proximité des grands axes de circulation, à proximité du futur parc des expositions.
La décision de suspension des travaux n’ayant pas été reconduite, le maître d’ouvrage peut poursuivre ses avancées, et si, dans ce délai accordé de dix mois, l’étude sur la capacité d’accueil des voiries quant au trafic accru et les mesures de compensation sont jugées insatisfaisantes, qu’adviendra-t-il de la construction en cours ?
Extrait du jugement
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36. Il ressort des pièces du dossier que les modifications à apporter au permis de construire du 10 juillet 2017 pour remédier au vice constaté ne consistent qu’à réaliser une évaluation environnementale suffisante, à procéder à la consultation du public requise par le code de l’environnement et à déposer un dossier de demande de permis de construire modificatif complet. Les modifications à apporter pour remédier aux vices constatés quant au permis de construire modificatif du 18 avril 2019 consistent à compléter l’évaluation environnementale et à procéder à la consultation du public requise par le code de l’environnement en son article L. 123- 2. Ces modifications n’impliquent pas, en elles-mêmes par leur nature ou leur ampleur, de modification du projet remettant en cause la conception générale de l’ensemble du projet. Ces illégalités sont ainsi susceptibles d’être régularisées et ne sauraient dès lors entraîner l’annulation de l’arrêté du 10 juillet 2017 et celui du 18 avril 2019 que dans cette seule mesure et sous réserve de régularisation. Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme et de fixer à dix mois à compter de la notification du présent jugement le délai imparti à Chartres Métropole pour justifier d’une mesure de régularisation des vices entachant le permis de construire du 10 juillet 2017 et le permis de construire modificatif du 18 avril 2019.
DECIDE:
Article 1°: En application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, il est sursis à statuer sur les conclusions de la requête de l’association de défense du quartier de l’Epargne pour permettre les régularisations décrites au point 36 dans un délai de dix mois.
Article 2°: Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n’est pas expressément statué par le présent jugement sont réservés jusqu’en fin d’instance.
Article 3°: Le présent jugement sera notifié à l’association de défense du quartier de l’Epargne, à Chartres Métropole et à la commune de Chartres.
Délibéré après l’audience du 12 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
Mme Borot, présidente,
Mme Montes-Derouet, première conseillère,
Mme Dumand, première conseillère.
Lu en audience publique le 26 novembre 2019,
La greffère,
Aurore MARTIN
La République mande et ordonne au préfet d’Eure-et-Loir, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.