William, de William Sheller
William Sheller est un Ovni dans la chanson française. Et certainement l’artiste le plus complet puisqu’il sait écrire sur partitions et arranger chaque morceau pour instruments classiques, pop ou rock. A 74 ans, William Sheller a décidé de mettre un terme à sa carrière. Après un burn out déclaré lors de la production de son dernier album, Stylus en 2015, l’auteur d’Un homme heureux a connu de sérieux problèmes de santé qui l’ont éloigné de la scène.
Lorsque William Sheller décide de prendre sa retraite, il met un point final à plus de cinquante ans de carrière et vend son piano. C’est l’occasion pour lui de revisiter sa vie et d’écrire ses mémoires dont le titre William annonce que ce voyage dans le temps est avant tout personnel et très peu show business. Même s’il a l’habitude de « balancer » avec humour sur ses amis, William Sheller préfère éviter de parler des gens qu’ils n’apprécient pas. Seuls restent les amis proches comme Patrick Juvet, Nicoletta et Catherine Lara que l’on découvre dans des situations souvent rigolotes au cœur des années 70-80. C’est d’ailleurs sur cette période que William Sheller s’attarde principalement. Les années où tout a commencé avec une Barbara l’employant pour arranger un de ses albums et qui lui souffle l’idée de chanter. Un conseil que William Sheller ne manquera pas de concrétiser avec un premier essai transformé qui le verra au Hit parade avec notamment Rock’n’Dollars en 1975.
Mais au-delà de la chanson, William Sheller parle de sa vie, de ses amours ambiguës. Installé en région parisienne, William Sheller ouvre sa maison à sa famille, ses proches, organise des fêtes avec le « ToutouParis ». Il évoque ses relations avec son ancienne femme et ses enfants. Il avoue tout net qu’il s’est également bien poudré le nez. Dans ce livre qui se lit au gré de la pensée de l’artiste, on apprend que William Sheller découvre le véritable nom de son père à la mort de sa mère. En 2006, il se rendra aux États-Unis pour faire la connaissance de ses demis frère et sœur.
Que retenir de William Sheller ? Que le plus intéressant de sa production arrive au début des années 80. Se positionnant avant tout comme un chercheur, il écrit des albums d’une qualité rare pour cette époque comme Univers, Ailleurs, qui nous plongent dans une ambiance pop-symphonique surréaliste. Lorsqu’il fait un détour par le rock, cela donne avec Albion en 1994 une sorte de concept album. Outre la musique, William Sheller signe des textes personnels qui ressemblent à sa musique. La preuve avec Les miroirs dans la boue :
Dans l’orage d’une forêt sans âge
Aux abords du Poitou
A l’automne où je vivais chez vous
J’ai vu le visage d’une enfant sauvage
Qui portait un bijou
Les yeux verts noyés de cheveux roux
A l’automne où je vivais chez vous
Dieu fait des images avec les nuages
La pluie fait des miroirs dans la boue
Je t’ai cherchée partout
Je garde un mirage dans une drôle de cage
Comme savent construire les fous
Je t’ai cherchée partout
Pascal Hébert
William, de William Sheller, éditons Équateur, 494 pages, 23 euros.