Robert Capa aurait eu 107 ans...
Endre Ernö Friedmann est né le 22 octobre 1913 à Budapest, d’ascendance juive hongroise. En 1931, la dictature de l’amiral-régent Horthy pousse la famille Friedmann à migrer en Allemagne. À Berlin, Endre s’initie avec talent à la photographie et au reportage. Mais l’arrivée d’Hitler et des nazis au pouvoir le contraint à un nouvel exil. Il s’installe à Paris, survit en réalisant des piges photographiques, et partage son esprit bohème avec d’autres expatriés originaires d’Europe de l’Est, dont le grand amour de sa vie : Gerda Taro.
À peine affublé de son pseudonyme Robert Capa, il se rend en Espagne avec sa compagne pour couvrir la guerre civile. En septembre 1936, son cliché représentant un milicien républicain fauché en pleine course par une balle franquiste le rend mondialement célèbre.
La mort accidentelle de Gerda Taro en juillet 1937, près de Madrid, l’accable au plus haut point. Il se requinque l’année suivante grâce à un reportage en Chine – agressée par le Japon – commandé par Life magazine. Dans la foulée, il revient en Espagne et dans les Pyrénées françaises au moment de l’agonie du Frente popular.
Quand survient l’agression allemande de la Pologne en septembre 1939, Capa se réfugie d’abord à Londres, ensuite à New York. En raison de sa nationalité d’origine, l’armée américaine tergiverse longtemps avant de lui accorder une accréditation de correspondant de guerre. Enfin muni du précieux sésame, il est envoyé en Afrique du Nord en mars 1943. En juillet, il photographie la reconquête de la Sicile et du sud de la botte italienne par les alliés.
À l’aube du 6 juin 1944, Capa débarque sur la plage d’Omaha Beach en Normandie, dans le sillage des premières troupes d’infanterie. Au milieu du carnage, il prend une douzaine de vues, toutes floues tellement il a peur et froid.
Le front de Normandie tenue par la Wehrmacht cède début août. À la mi-journée du 16, l’avant-garde de la 3ème armée américaine atteint le centre-ville de Chartres. Deux photographes l’accompagnent : Robert Capa et Ralph Morse. À l’intérieur de l’enceinte de la préfecture, les deux reporters mitraillent des femmes tondues. Puis, dans la rue, au milieu de la foule vengeresse, Capa immortalise l’une d’entre elles, qui tient son bébé dans les bras : Simone Touseau.
Passée l’ultime offensive alliée du printemps 1945 en Allemagne, Robert Capa reprend son existence de jouisseur invétéré. Il a une liaison avec l’actrice Ingrid Bergman, joue de sa notoriété pour acquérir la nationalité américaine, cofonde l’agence Magnum, visite l’URSS, découvre la Palestine déchirée entre Anglais, arabes et sionistes.
Au printemps 1954, Capa se transporte en Indochine, au Tonkin, dans le delta du Fleuve rouge. L’après-midi du 25 juin, il accompagne une patrouille de l’armée française chargée d’évacuer des positions après la défaite de Diên Biên Phu. Cheminant sur la digue d’une rizière, il déclenche l’explosion d’une mine antipersonnel. Il meurt, exsangue, en quelques minutes.
Robert Capa est enterré aux États-Unis d’Amérique, dans le cimetière d’Amawalk, dans l’État de New York.
Gérard Leray