Petite soeur, de Marie Nimier
Avec son dernier roman Petite sœur, Marie Nimier nous embarque dans une histoire familiale où l’emprise s’impose au fil de la lecture. Et tout commence avec la disparition de Mika, le frère d’Alice. Ces deux enfants, nés de parents artistes, sont inséparables. Si Alice est l’aînée, Mika ne tarde pas à prendre l’ascendant en l’appelant bizarrement« petite sœur ».
Ces deux-là ne se quittent pratiquement pas. L’un et l’autre ont besoin de cette relation qui ressemble à de la complicité… jusqu’au moment où un événement fait prendre le large à Alice qui ne reverra plus son frère pendant de nombreuses années. A l’annonce de la mort de Mika, Alice se sent obligée de retourner dans le passé et de coucher sur le papier tous les tourments qui encombrent son deuil. Un seul moyen : partir se réfugier dans un logement neutre loin des siens, d’elle-même et de sa vie. Elle trouve refuge du côté du Havre. Le propriétaire d’une location, désireux de faire un voyage, lui laisse son appartement avec la seule consigne de prendre soin de son chat Virgile. Un chat, dont l’absence remplit également les lignes de ce roman véritable traversée du miroir.
Entre le quotidien, les appels téléphoniques de sa grand-mère, du propriétaire et de ses parents, Alice revient sur son enfance avec Mika. Les nombreuses anecdotes refont surface comme des bulles de savon au gré de l’humeur d’Alice. Tout doucement, le portrait en pointillé de Mika se précise, de même que l’étrange relation qui unit le frère et la sœur. Le comportement de Mika, aussi excentrique qu’il apparaît, laisse pointer une faille. Il enferme Alice dans un jeu complexe, où il se donne le bon rôle en voulant secouer celle qu’il tente de façonner. « J’étais calme, mais je n’étais pas sereine. Je n’ai jamais été sereine. J’ai toujours eu l’impression d’avancer dans la vie en tirant des casseroles derrière moi, des casseroles pleines qu’il ne faut pas renverser sous peine d’être salie. » explique Alice pour se définir.
L’attachement de Mika et d’Alice est si fort qu’ils prendront la décision de vivre ensemble et de louer un appartement. Pour Mika, la relation avec sa sœur doit évoluer pour devenir encore plus fort, plus intime. Un pas qu’Alice refuse de franchir et qui met un terme à cette relation ambiguë, poisseuse et malsaine. Il faudra toute la patience de Tiago, un peintre attentif rencontré au hasard d’une promenade, pour qu’Alice puisse entrevoir un avenir.
Pascal Hébert
Petite sœur, de Marie Nimier, éditions Gallimard, 226 pages, 19 euros.