La mémoire du "9-11" (8)
C’était un jour en semaine. J’étais alors proviseur-adjoint dans un lycée des Yvelines. Je suis entré en fin de matinée dans le bureau de ma collègue proviseure. Poursuivant son travail d’écriture, elle s’est immédiatement adressée à moi en me disant : « Il a dû se passer quelque chose aux États-Unis ». Je me souviens de ce « quelque chose » et du ton grave qu’elle avait employé et qui m’avait fait penser à un attentat ou au meurtre d’une personnalité.
Cette information lui venait d’un coup de fil reçu quelques minutes auparavant. Mais elle n’avait alors pas plus de détails, les moyens de communication n’étant pas aussi rapides et sophistiqués qu’aujourd’hui.
Je suis rentré déjeuner dans mon logement de fonction qui jouxtait le lycée. Et c’est en regardant les actualités que j’ai découvert avec stupeur les attentats.
Qui aurait pu imaginer jusqu’à ce jour que des hommes soient capables de tels actes ? Même mon père qui a 93 ans et qui me parle souvent de ce qu’il a connu durant la guerre était resté sans voix lors de nos premiers échanges suivant ces attentats.
Comment ne pas penser encore aujourd’hui à ces instants effroyables qu’ont vécus les victimes, passagers des vols ou présents dans les tours ?
Nous avons, hélas, depuis ce 11 septembre 2001, eu plusieurs occasions de dire « il y aura un avant et un après ». Mais cette date aura bel et bien marqué, pour bon nombre d’entre nous, notre vie et l’histoire de ce nouveau siècle.
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Je venais d’effectuer ma première rentrée scolaire dans un nouveau poste, comme directeur de la SEGPA au collège « Les Petits Sentiers » à Lucé, poste que j’avais pris une quinzaine de jours plus tôt dans le cadre de la préparation de rentrée.
Bref, le 11 septembre fut pour moi un jour tout à fait ordinaire, une tâche succédant à l’autre, alors que les suivantes s’accumulaient…
Établissement calme, élèves au travail, enseignants sollicitant qui du matériel, qui une info sur un élève ou une modification d’emploi du temps… Situations particulières à prendre en compte (transports, cantine, AS, rendez-vous de prise en charge, etc.), dossiers à compléter, rendez-vous à prendre, l’ordinaire !
Après 18 heures, élèves et enseignants partis, je quittai mon bureau pour retrouver le principal et son adjointe afin d’effectuer le point quotidien avec bilan du jour et actions à mener en priorité.
J’appris alors, une petite heure après eux, ce dramatique attentat qui a marqué un tournant dans toutes les vies, la destruction du WTC, et ses innombrables victimes.
Sidération est le mot le plus juste, qui suivit immédiatement l’incrédulité face à un jusqu’alors impensé.
À l’époque, pas de téléphones portables (ou si peu, j’avais le mien comme transplanté, mais ne l’utilisais évidemment pas au travail), pas de réseaux sociaux, pas même un téléviseur qui n’était allumé qu’à visée pédagogique !
Nous avons brièvement échangé sur ces informations, qui ne devaient toutefois pas polluer le travail qu’il nous restait à faire avant de nous séparer.
Ce n’est que dans mon véhicule que je fus, par le biais de l’autoradio, informé plus complètement des événements du jour, alors que des mesures d’ampleur étaient prises aux USA face à ces multiples attaques aériennes (avions cloués au sol).
Déjà à l’époque – en étaient-ce les prémices ? – les différents médias surjouaient le catastrophisme alimentant l’angoisse, à coup d’exclusivité, de réactions, de supputations, de politologues, islamologues, baratinologues et autres spécialistes de tout et de rien…
C’est à l’arrivée à mon domicile que je mesurai vraiment, devant mon téléviseur, la réalité de l’événement et de ses morbides conséquences, sans toutefois savoir alors où tout cela allait conduire.
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Le 11 septembre 2001, je revenais d’une visite de chantier à Dreux. À mi-chemin de Chartres, j’ai entendu à la radio qu’un avion avait percuté une tour à New-York. L’origine de l’accident n’était pas encore connue. On décrivait déjà les difficultés des occupants pour se dégager.
Au lieu de rentrer au bureau, je suis passé chez moi et j’ai allumé la télé. Immédiatement, j’ai vu, presqu’en direct le second appareil s’encastrer dans l’autre tour. Ces deux annonces successives m’ont sidéré.
La terreur ne fait pas partie de mon registre émotionnel. La colère n’a pas été non plus un réflexe, bien que ce soit plus dans mes gènes.
Dans un deuxième temps, c’est plutôt la compassion qui m’a gagné en voyant et imaginant le calvaire des gens qui étaient bloqués, qui se défenestraient, et les efforts, en grande partie vains, des sauveteurs.
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Le 11 septembre 2001, J. et moi formions un couple « clandestin ». Nous ne vivions pas encore notre amour au grand jour. Nous étions à Orléans, à l’hôtel, selon le titre d’un film de Rohmer, L’amour l’après-midi. J. avait entendu l’information à la radio sur la route. Dans la chambre, nous avons allumé la petite télé. Contrairement à J., mon premier sentiment fut une sorte de sidération mêlé de « déni ». Je n’ai pas pu ou pas voulu mesurer la gravité de l’événement (mon cataclysme était dans ma vie personnelle), contrairement à J. qui a ressenti une énorme stupéfaction (un film catastrophe hollywoodien qui devenait réel). « La vie comme du cinéma », sur le plan personnel, et sur le plan collectif. En redescendant dans le hall avant de repartir chacun dans nos vies officielles, la télé était allumée et nous avons vu les images des avions s’écrasant contre les tours. Ce n’est que quelques jours après que j’ai compris l’importance de ce qui s’était passé…
La mémoire du « 9-11 » (1)
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« 9-11 »
Il y a 19 ans…