La mémoire du "9-11" (13)

Je me souviens avoir appris les événements du 11 septembre dans mon bureau à l’agence de Dreux de L’Écho républicain. Le ciel était déjà chargé comme un ciel d’automne. Lorsque nous avons appris que le premier avion s’était encastré dans une des tours, avec les journalistes présents, nous avons allumé la télévision dans la salle principale de l’agence et nous avons vécu ensemble le second attentat. Le temps semblait suspendu. Vivre en direct un tel événement était inimaginable. Je me souviens que personne ne parlait. L’effroi avait succédé à la stupeur et à la sidération. Difficile ensuite de retourner travailler. Le soir en rentrant à la maison, j’ai ressenti un malaise plus profond mélangé à un véritable sentiment d’impuissance. Le choc en quelque sorte.

*

Je pense que c’était un lundi, la météo était maussade, avec un ciel couvert, gris. Après la rentrée scolaire, cette météo sifflait définitivement la fin des congés. Je travaillais à l’école élémentaire de Thivars, avec des CM1/CM2.
À 16 heures 30, je quittais ma classe pour me rendre en mairie, où je devais porter un quelconque papier ou une demande de renseignements administratifs.
La secrétaire de mairie, que je connaissais depuis plusieurs années et avec laquelle j’avais tissé des liens amicaux, me dit : « Tu sais ce qui se passe à New York ? » Et moi, étonné, de lui répondre : « Eh bien non, j’étais en classe et n’ai pas écouté les infos. »
Pour rappel, il y a deux décennies, la « pieuvre » Internet/réseaux sociaux/chaînes d’info en continu envahissante n’avait pas le même poids qu’aujourd’hui. Je suis abattu par la nouvelle. Je me souviens de l’air catastrophé de la secrétaire persuadée que « cela va nous apporter la guerre ».
À cette heure, nous avions peu d’éléments pour comprendre la situation. Je suis rentré chez moi et ai regardé la télé. Les éditions spéciales tournaient à plein régime, les images en boucle donnaient le vertige, provoquaient l’incrédulité.
Toujours encore et encore, la collision des avions avec les tours, comme quelque chose de jamais vu, jamais même imaginé dans les films catastrophes. Plus fort qu’Hollywood ! On avait peine à croire ce que l’on voyait. Et puis le dîner, et encore un peu de télé. Quand je suis allé me coucher, je crois que je ne réalisais pas encore la monstruosité totale de cet acte, et n’envisageait pas les conséquences meurtrières de la suite.
Les jours suivants, j’ai très peu regardé les images télévisuelles, je préfère la radio. J’ai aussi lu la presse, tenté de mettre en relation tous ces éléments pour arriver à la conclusion que cet acte de guerre allait certainement déclencher de lourdes conséquences dans la vie de nombreux hommes et femmes du monde.

*

Ce jour-là, j’étais au bureau, porte ouverte sur le couloir, comme à mon habitude. Soudain, j’entends une collègue courir dans le couloir toute affolée. Je sors pour lui demander ce qui ne va pas et là, elle me dit : « Les Israéliens ont attaqué les États-Unis ! ». Je lui dis que c’est impossible pour au moins deux raisons, la distance et le fait que ce sont deux alliés. Elle persiste sur l’attaque des USA, mais ne sait plus trop pour les attaquants. Néanmoins, je crois vraiment qu’il s’est produit quelque chose de grave.
On rentre dans mon bureau pour regarder les infos sur l’ordinateur. Impossible de se connecter. J’avoue que, sur le moment, j’ai pensé à un black-out. Puis j’ai constaté que l’Internet était saturé, tout simplement.
Je suis rentré chez moi dès que possible et me suis branché sur BFMTV. Là, j’ai vu les images comme tout le monde. Je me souviens d’un fait qui, bizarrement, m’a marqué : les Américains ont très rapidement placé un porte-avions au large de la côte Est pour protéger Washington et New York d’un éventuel débarquement ou d’un raid. Dans la panique générale, j’ai trouvé ça remarquable. Deux jours après, j’étais dans le bureau du DGS lorsqu’on a appris qu’il se passait quelque chose en France. Il a allumé la télé et on a vu l’usine AZF dévastée par une explosion.

*

Je me souviens de cette journée horrible du 11 septembre 2001 comme si c’était hier. On ne peut pas bien comparer un événement avec un autre. Celui-là est incomparable, comme si c’était la fin du monde.
Il était 15 heures 30 ce mardi 11 septembre, j’étais en salle de réunion au CIC place Marceau lorsque quelqu’un est entré dans la salle et nous a dit : « Les deux tours jumelles à New-York viennent d’exploser, on parle d’un attentat terroriste. Deux avions en un peu plus d’un quart d’heure ont percuté les tours du Word Trade Center ».
À partir de ce moment-là, tout s’arrête, tout le monde est penché sur les infos venant des États-Unis. En France, il est 16 heures, à New-York, 10 heures du matin. Les Américains se réveillent dans l’horreur. À partir de 18 heures, je rentre chez moi. Infos non-stop jusqu’à environ minuit, une heure du matin peut-être plus, je ne me souviens plus.
Au fur et à mesure que les images étaient diffusées, les larmes coulaient sur mon visage. Des scènes incroyables. Des gens se jetaient des fenêtres à des hauteurs impressionnantes.
Je me suis d’autant plus intéressé à cet événement que, deux mois auparavant, en juillet 2001, j’étais allé à New-York : une semaine avec cinq jeunes gens en récompense d’un concours virtuel sur l’évolution d’un portefeuille d’actions françaises.
J’avais donc été désigné pour encadrer ce groupe. C’était la première fois que je mettais les pieds sur le sol américain. Le programme de visites incluait était Wall-Street et les deux tours jumelles du Word Trade Center. À l’occasion, nous étions montés au sommet de la tour sud, je crois. La vitesse de l’ascenseur qui avait gravi les 110 étages était impressionnante.
J’avais pu prendre des photos de Manhattan du haut de cette tour, la statue de la Liberté, les ponts de Brooklyn et de Verrazano. Cette semaine de juillet 2001 fut pour moi la découverte d’une ville comme je la voyais dans les films.
Rien ne laissait penser que, deux mois plus tard, elle serait endeuillée par cette terrible catastrophe.
J’y suis donc retourné en novembre 2006 pour courir le célèbre marathon. J’ai senti que l’ambiance que j’avais connue en juillet 2001 avait disparu dans le cœur des New-Yorkais.

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« 9-11 »
Il y a 19 ans…