Génération Écologie : à l'aube d'une présidence écologiste

C’est Lyon qui a accueilli la 13ème Convention nationale de Génération Ecologie les 9 et 10 juillet derniers. En chemin le long de la Saône vers ce quartier emblématique de Confluences, où se mêlent audaces architecturales, friches industrielles en devenir et arbres miraculés grâce aux pluies récentes, on constate les premiers signes du changement d’équipe dans la cité : pêchers et vignes en espalier dans l’espace public. Dans la halle où avait été célébré le dernier meeting de campagne du futur nouveau maire, ils sont plusieurs centaines de militants à s’atteler aux statuts et surtout à inscrire les perspectives, à l’heure où la députée Delphine Batho, présidente de GE, vient de déclarer sa candidature à la primaire des écologistes en vue de l’élection présidentielle. Tour d’horizon des problématiques.

Le burn out de la terre

On en était « seulement » en ce début de juillet au dôme de chaleur sur le Canada et l’Oregon, mais les débats ne pouvaient se lancer sans que soit établi un état des lieux : catastrophes pas du tout naturelles, épuisement des ressources, effets délétères de la surexploitation humaine du vivant. C’est peut-être la référence à la tragédie antique qui exprime le mieux l’urgence climatique : l’humanité a endossé le rôle du héros ballotté d’incendie en inondation, le GIEC clamant ses alertes tel le choeur qui tente de le guider… Cédric Villani, député indépendant et porte-parole de Delphine Batho, citant l’ouvrage de Rachel Carson, Printemps silencieux, qui décrivait déjà voici six décennies l’extinction des oiseaux et des insectes, accuse le primat têtu de la croissance à tout prix . Est rappelée la « faiblesse de l’action politique » mentionnée dans l’Encyclique Laudato si.

« Jusqu’où faudra-t-il aller pour que les gens réagissent ? » interroge le maire de Lyon, Grégory Doucet, qui plaide pour que « la parole scientifique migre vers le politique ». L’écologie de gouvernement est la seule voie, et la stratégie de gouvernement doit se régler sur l’avenir des enfants. C’est le choix de l’exécutif lyonnais : la mesure et le fondement de toute action, c’est l’épanouissement de l’enfant dans la ville, son éducation, son bonheur, sa liberté d’aller et venir sans danger. C’est ainsi qu’a commencé le processus systématique de sécurisation aux abords des écoles (l’affaire concerne la totalité d’un espace de vie, et exige diplomatie autant que technicité) ; objectif : totalité des établissements sécurisés à la fin du mandat. Cette ambition de privilégier le point de vue des enfants engage la totalité des autres décisions, forcément : c’est un pari sur l’avenir, sur la durabilité des décisions, qu’il s’agisse de protéger l’eau, parmi les biens communs, l’approvisionnement en alimentation saine, d’assurer des transports décarbonés et sûrs, par exemple.

Gouvernance et citoyenneté

Il est très vite apparu que, pour entreprendre une transition écologique résolue, désormais reconnue comme vitale, il faut « embarquer » tous les citoyens. Et cela ne se décrète pas, cela s’élabore grâce à l’instauration de la confiance, celle qui se révèle aujourd’hui perdue, ainsi qu’en atteste la désaffection du politique, caractérisée notamment par l’abstention aux élections. L’expérience rapportée par le jeune maire (29 ans) élu en 2020 dans une des villes les plus précaires des Deux-Sèvres, Saint-Maixent l’Ecole, est éclairante. D’abord, la campagne électorale a pris la forme, sur deux années, de cafés citoyens, qui ont permis l’expression par les intéressés de leurs besoins et aspirations.

Aujourd’hui, la gouvernance municipale en est changée : des commissions réunissant chacune cinq élus et dix citoyens, dotées d’un budget, élaborent des projets dans un plan pluri-annuel. Les trois quartiers les plus défavorisés sont impliqués et, soit dit en passant, on a voté là-bas aux dernières élections comme jamais ! Les dispositifs mis en place pour la vaccination selon le même principe participatif ont aussi prouvé que l’engagement citoyen est plus efficace que les oukases préfectoraux. Il s’agit bien de décloisonner vie et politique, d’instaurer dans les quartiers, les entreprises, les associations la proximité avec la chose politique : plus de hiérarchie entre élus supposés savoir ce qu’il faut faire, et qui décident à huis clos, et habitants, mais bien une égalité républicaine productive – qui aura elle-même une incidence sur la compréhension du statut d’élu dans la population.

Placer la vérité écologique au centre de l’élection présidentielle

C’était toute la substance du discours d’entrée en lice de Delphine Batho, qui alliait au lyrisme républicain l’art de ne pas mâcher ses mots et la fierté de porter crânement la thèse de la décroissance. Elle aussi, elle a commencé en questionnant : « Comment en sommes-nous là ? Comment se retrouver au bord du précipice, dans un pays doté de tant d’intelligences ? »

Elle propose de livrer un combat d’idées, un combat de survie. Pas d’autre chemin que d’arrêter une croissance qui, « arnaque totale », n’a pas conduit au bonheur, mais a causé extinction, écocide et maladies, les plus grandes inégalités sur terre, a relégué les territoires ruraux, enlaidi les paysages, disqualifié les décisions sanitaires urgentes. Or, la décroissance est déjà là, elle n’a pas attendu les décrets ni les autorisations : amap, recycleries, brocantes, leboncoin, bénévolat, Incroyables Comestibles, flexitarisme, jeunes diplômés se tournant vers les métiers indispensables, etc. Partout, sans le savoir, nombre de citoyens ont déjà mis en pratique cet art de décroître solidairement. Il faut aller vers une nouvelle définition de ce qu’est le progrès ; organiser la sécurité, qui n’est autre que la résilience : se préparer aux canicules, aux sécheresses, adapter les villes, anticiper les difficultés de récoltes.

Fixer un tel cap équivaut à entamer une transformation des pouvoirs : la révolte contre l’inaction écologique, qui met au jour la mainmise du capitalisme sur les Etats, est aussi une révolte féministe, laïque, républicaine, en faveur de l’égalité, de la diversité, une mise en question du patriarcat. Toute concentration du pouvoir dans les mains d’un seul doit laisser place à la collégialité. Le Parlement devra être souverain, et donc le présidentialisme aboli : Delphine Batho se présente à l’élection présidentielle pour transformer ce pouvoir et ouvrir à transformation des institutions, à la séparation entre l’État et les intérêts privés et à la réhabilitation d’une éthique de service public. S’appuyant sur la vision d’une France qui a toujours été à l’avant-garde des combats, d’abord perçus comme utopiques, l’abolition de la monarchie, l’instauration des congés payés, elle estime que celui de l’écologie n’en constitue qu’une nouvelle étape. En somme, un nouveau projet de civilisation, ainsi que l’atteste le chantier programmatique mené en ateliers par les adhérents et sympathisants de GE, issus de tous métiers et secteurs de la société.

« Agir, pas gémir », préconisait un des participants. Au terme de ces rencontres qui furent chaleureuses et pleines d’espoir autant que studieuses et nourries de discussion serrée, quelqu’un se contenta d’observer que les vacances étaient finies : à chacun de convaincre autour de soi, et au-delà, que Delphine Batho est capable, grâce à son expérience, à son courage et à la fermeté de sa conviction, d’inaugurer en Europe une politique qui engage la réparation terrestre. S’il est temps de s’y mettre, il est encore temps ! ENSEMBLE, dit-elle.

Chantal Vinet

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