Ça commence à faire long...
La séance du conseil municipal du 5 octobre 2023 débute par une présentation du projet d’aménagement touristique de l’esplanade de la cathédrale : un gris trou, du béton au dessus et toujours moins d’arbres : une heure trente de promotion d’un énième projet inutile avant d’ouvrir un débat qui n’était pas à l’ordre du jour et que personne n’avait donc pu préparer, à l’exception du maire…
Jean-Pierre Gorges s’exprime en ces termes au sujet des vestiges archéologiques remblayés : « Il y a en dessous un petit capital qui dort ». « Il sera présenté à deux voix : moi, un petit peu, puis le directeur du patrimoine beaucoup plus ». En réalité, le maire monopolisera les trois quarts de la parole, comme à son habitude. « À gauche de l’esplanade, un fouillis rempli d’arbres et de bâtiments divers, (…) c’est un endroit pas tout à fait digne ». « La cosmétopée fera un peu de verdure ». Il faut entendre par « cosmétopée » des parterres végétalisés accompagnant le siège de la Cosmetic Valley… Il avoue ensuite, comme nous l’avons tout de suite remarqué, que le plan de l’équipement ressemble parfaitement à un parking souterrain.
Lorsqu’Olivier Maupu se remémore les fouilles initiales de 1990-92 lors de son enfance quand certains parmi nous n’étaient pas encore Chartrains, le maire l’interrompt : « Vous êtes vraiment une petite vipère ».
« Ce projet sera financé par les visites, il suffit d’en étaler l’amortissement ». « Les banquiers sont intéressés par ce projet et pour nous accompagner dans une SEM (…) on peut envisager des emprunts sur 40 ou 50 ans… »
« Il faut démarrer très vite, car c’est un centre de profit qu’il nous faut rapidement »
Après une heure trente de sermon pour ce nouveau centre de profit, l’ordre du jour ne débute qu’à 22 heures…
Nous n’avons pas été épargnés par les habituelles provocations, la dernière étant de prendre pour ce nouveau projet l’exemple du pôle gare qui a permis de faciliter l’accès aux trains à tous les usagers, même les cyclistes (« Sauf aux grosses sacoches, aux échasses et aux palmes ! », running gag).
Il nous est proposé de modifier le régime de remboursement des agents municipaux en mission extérieure, à savoir remplacer le forfait de vingt euros par repas par un remboursement aux frais réels sur justificatifs plafonné à vingt euros. Je demande alors par souci d’exemplarité et d’équité que le maire observe dorénavant la même règle et qu’il fournisse les justificatifs de ses dépenses mensuelles plafonnées à 3 500 euros (qu’il touche donc intégralement) au titre de ses frais de représentation municipal et communautaire. Il me répond que la loi ne l’oblige à rien en la matière (ce qui est faux) et que je ne peux pas m’empêcher à toute occasion « d’insinuer la suspicion derrière vos petites lunettes ».
Au sujet des restrictions d’ouverture de la médiathèque (de 40 à 28 heures hebdomadaires !) :
« C’est une expérimentation ; si demain on me prouve que l’avenir c’est de graver à nouveau des textes dans la pierre, pourquoi pas, mais je ne suis pas sûr que ce soit une bonne direction. »
« Vous êtes complètement dans l’idéologie, Mme Marre, (…) c’est fascisant de me demander de stopper cette expérimentation au prétexte d’une pétition, (…) en matière de service public, vous racontez n’importe quoi, les services publics ne peuvent pas être ouverts tout le temps, même à l’hôpital le service de réanimation ne fonctionne pas tout le temps (???) »
Aux inquiétudes exprimées par Jacqueline Marre quant à l’avenir de la bibliothèque de la Madeleine dont le bâtiment est promis à la démolition dans le cadre des grands projets gorgiens, le maire rétorque qu’il n’y avait pas encore pensé à sa fermeture mais que si cela devait arriver il expliquerait que c’est elle qui lui a donné l’idée !
« Vous êtes des gens d’extrême gauche qui souhaitez perturber la conduite de la cité »
Le maire annonce que l’école Henri IV bénéficiera d’un projet pilote d’introduction de l’IA : rien n’aura été épargné aux élèves de Beaulieu !
« Dans mon jeune temps, j’ai été chargé de l’informatisation du stock de livres d’un grand distributeur » : que n’a-t-il pas fait dans sa vie ?
Nous passons au vote après que Jean-Pierre Gorges a failli oublier de donner la parole à son adjointe à la culture qui tente péniblement, et agacée, de mettre en perspective cette baisse d’amplitude de l’accueil du public et toute l’importance que la ville porte aux missions de la médiathèque ! Madame Vincent n’était pas très à son aise : aurait-elle du mal à assumer la mutation de l’équipement en méd-I.A-thèque ?
Sept votes contre : Ladislas Vergne joint son vote aux nôtres.
Le sursis à statuer dans le secteur Maunoury (87 hectares) :
Précisons que cette disposition permet au maire de refuser tout projet dans le secteur, en attendant que des études globales (commandées depuis 18 mois à Chartres Aménagement, mais dont nous n’avons obtenu aucun élément malgré nos demandes) soient menées sur l’avenir du quartier. Cette disposition autorise à tout interdire, mais n’interdit pas de tout autoriser dans le cadre d’un PLU si permissif : bref, le « fait du roi » dans une zone de non droit ! On peut supposer que les porteurs de projet associés par SCCV à Chartres Développement Immobilier ne seront guère empêchés par cette disposition…..
Durant la prise de parole d’Olivier Maupu, le maire me regarde en faisant des signes m’indiquant qu’il est fou. « Indiquez-moi là où nous avons bétonisé, il n’y en a pas un seul : vous êtes incapable de me citer un exemple ». Il le qualifie ensuite de menteur, sourd et incompétent. Mme Dorange n’intervient que pour souligner qu’elle est très déçue : elle le pensait professionnellement plus compétent…
Lorsque je dis qu’obliger la construction de deux places de parking par logement, même en sous-sol pour les cacher, ça n’est pas préparer la ville aux terribles enjeux climatiques, il m’est répondu que nous sommes liberticides.
Il nous est désormais confirmé que 50 centimètres de terre sur une dalle n’est pas de l’artificialisation et permet d’implanter pelouse et arbustes qui sont aussi utiles que les arbres. Les arbres ne serviraient à rien en ville, ils sont faits pour la campagne : « J’ai traversé les 60 kilomètres du plateau ardéchois, il y a des arbres partout mais pas d’habitant ». CQFD.
Fin du conseil à minuit et un constat : plus les adjoints de la majorité sont silencieux et plus le temps paraît interminable : trois ans et demi de one-man show, ça commence à faire long…
Jean-François Bridet, conseiller municipal Chartres Écologie
Photo : Jean-François Bridet pendant la manifestation du 7 octobre contre le projet d'A154, sur la place des Épars.